A Contre-courant : Il n’est point de Bové suprême !




Chaque mois, le mensuel Alternative libertaire reproduit l’édito de la revue alsacienne À Contre Courant, qui de son côté reproduit l’édito d’AL. Pour contacter ces camarades : ACC, BP 2123, 68060 Mulhouse Cedex.

Le résultat du référendum français sur feu le traité " constitutionnel " européen, renforcé par son homologue néerlandais, n'a pas fini de produire ses effets politiques, sur le plan national comme au niveau communautaire. Tandis que les uns ont été renvoyés à leur anonymat antérieur (qui se souvient encore de Raffarin ?) ; tandis que les autres tentent, tant bien que mal, de panser leurs blessures (n'est-ce pas Hollande et Wehrling ?) ; d'autres pensent déjà aux perspectives, nouvelles ou confirmées, que leur ouvre ce résultat.

Sur la scène politique, à moins de deux ans de l'élection présidentielle, les appétits s'aiguisent et, avec eux, les couteaux pour les satisfaire. À droite, en redevenant le premier flic de France, Sarkozy a déjà annoncé la couleur : il entend jouer les Monsieur Propre, prêt à nettoyer la France entière au Kârcher si telle est la condition pour accéder à l'Elysée. Et gare à qui se mettra sur son chemin. A la place du tendre Bayrou et du précieux de Villepin, on se méfierait : un sale coup est si vite parti…

À gauche, c'est déjà le trop plein. Fabius, évidemment, mais aussi Emmanuelli et pourquoi pas Mélenchon, entendent bien rafler la mise du formidable coup de poker menteur qu'ils viennent de réaliser. Mais, pour parvenir à leurs fins, il leur faudra non seulement reconquérir le PS, mais encore faire oublier toute leur responsabilité - et elle est grande - dans la mise en œuvre, depuis plus de vingt ans, au niveau national comme au niveau communautaire, des politiques néolibérales dont ils feignent aujourd'hui de découvrir les ravages sociaux.

Mais ce ne sont pas les seuls qui rêvent de capitaliser les " non de gauche " pour s'en faire un matelas de suffrages à la présidentielle de 2007. Déjà des voix se font entendre, à la gauche de la gauche gouvernementale, pour s'opposer à l'OPA des précédents et mettre en selle un candidat qui soit " authentiquement " antilibéral et altermondialiste. Plus précisément même, le nom de José Bové se met à circuler ; et, interrogé sur ses intentions à cet égard, contrairement à ses habitudes, ce dernier a laissé entendre qu'il pourrait envisager de céder à la sollicitation pressante des ses amis.

Mettre l'ensemble des voix de gauche qui se sont portées sur le non et, plus encore, l'ensemble des citoyens qui, à travers les comités pour " un non de gauche ", ont mené campagne, à la remorque d'une candidature José Bové à la prochaine présidentielle serait proprement enterrer le faible espoir né de cette mobilisation citoyenne. Non pas parce qu'il s'agit de José Bové, qui n'est ni pire ni meilleur que d'autres histrions politiciens qui pourraient le remplacer. Mais parce que l'acquis de cette mobilisation citoyenne est d'avoir permis, pour la première fois depuis longtemps, à une partie significative du salariat de s'interroger à nouveau, collectivement et d'une manière autonome, sur le type de société qu'elle veut et surtout ne veut pas. Subordonner les comités pour " un non de gauche " à une échéance et une candidature électorales serait perdre tout l'acquis, encore bien fragile, de cette mobilisation. C'est donc à renforcer l'autonomie de ces comités et à y approfondir la discussion et la réflexion collective qu'il faut impérativement travailler, loin des enjeux factices des campagnes électorales à venir.

 
☰ Accès rapide
Retour en haut