Accident nucléaire : Après le crash-test de Marcoule




Que s’est-il réellement passé à Marcoule (Gard) le 12 septembre ? Il faudra certainement attendre les conclusions de l’enquête de l’Autorité de sûreté nucléaire pour y voir plus clair. Mais le cœur du problème est ailleurs.

Lundi 12 septembre, à 11 h 45, sur le centre nucléaire de Centraco appartenant à la Soccodei, filiale d’EDF, un four servant à incinérer des déchets radioactifs en provenance d’installations nucléaires militaires et civiles explose. Bilan : un mort et quatre blessés, dont un grièvement. La sirène du site destinée à mettre en place le plan d’urgence interne retentit. Celle-ci est entendue par la population avoisinante qui, inquiète, allume radios et télés. A 13 heures, les médias sont informés de l’accident par les pompiers présents sur place. L’information circule : explosion à Marcoule, risque de fuites radioactives. Panique dans le Gard. Les directeurs des écoles, n’ayant aucune information officielle, décident de confiner les élèves dans les salles de classe, les standards des mairies sont assaillis de coups de téléphone, les demandes de pilules d’iode en pharmacie explosent, le drame de Fukushima est encore présent dans toutes les têtes.

Ce n’est qu’à 15 heures que l’information officielle tombe : pas de rejet radioactif inhabituel dans l’atmosphère.

[*Silence radio des autorités*]

Heureusement, dira-t-on. Mais cet accident est un bien triste révélateur : la France ne saurait pas réagir face à un drame nucléaire majeur. Comment peut-on expliquer que plus d’une heure après l’explosion du four, la préfecture n’avait toujours pas communiqué sur l’accident et que ce soient finalement les pompiers qui informent les médias ? Comment peut-on laisser pendant trois heures une population livrée à elle-même avec le spectre de fuites radioactives importantes à quelques kilomètres de chez elle ? Et surtout que ce serait-il passé si ces fuites s’étaient avérées réelles ? La réponse des autorités, répétée comme une évidence, le « PPI » aurait été déclenché. PPI ? Plan particulier d’information. La solution française pour garantir une protection et une sécurité optimale à tous les habitants et habitantes vivant à proximité d’une installation nucléaire. Un dispositif mené de front par tous les acteurs – pompiers, gendarmerie, Cellule mobile d’intervention biologique et radiologique, armée, services de la préfecture, etc. – visant à fermer l’accès à un périmètre de deux kilomètres autour du site en question, à informer et à confiner les populations présentes dans ce périmètre.

C’est tout ? Oui, c’est tout. Un exercice d’entraînement a lieu tous les ans afin d’huiler ce dispositif. Fermeture exceptionnelle des magasins ce jour-là, avertissement de la population plusieurs semaines en amont, mise en place des blocages routiers avant l’ordre officiel de la préfecture, personne ne joue le jeu. Comme si l’éventualité d’un accident nucléaire en France était une hérésie. Et le résultat est souvent navrant, à des milliers de becquerels d’une quelconque mise en situation réelle. On n’est pas passé loin de la mascarade à Marcoule, ou d’un nouveau désaveu de la fiabilité et de la sûreté du nucléaire français.

Il devient bien difficile de masquer le vieillissement des installations, de rester aveugle devant tous les signes de faiblesse affichés par les centrales et de croire encore en la compétence des autorités dans le cas d’un Fukushima hexagonal. Ce modèle vacille de plus en plus mais ne rompt toujours pas. Qui peut pourtant encore y croire ?

Antoine Concil (militant écologiste)

 
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