Agriculture : Les salarié-e-s livré-e-s en pâture




Depuis septembre, le gouvernement français s’attaque aux salarié-e-s agricoles, saisonniers ou permanents. Derrière les promesses d’exonération, une politique de casse sociale, au service des grands exploitants.

« Le premier mot, c’est compétitivité » : autant dire que Bruno Le Maire, annonçait la couleur dès septembre dernier, dans le discours qu’il avait prononcé à Rennes. Le ministre de l’Agriculture se dépêchait aussitôt de préciser sa pensée : « La compétitivité, c’est d’abord la maîtrise des coûts de production. Et dans les coûts de production, d’abord le coût du travail. » [1] Le Maire se félicitait à cette occasion du bilan gouvernemental, en matière d’allégement du coût du travail agricole occasionnel (saisonnier). On ne saurait s’arrêter en si bon chemin : c’est ainsi que le budget du ministère prévoit de consacrer presque 10% des crédits publics à exonérer les employeurs de leurs cotisations sur le travail salarié saisonnier. Début octobre, un communiqué de la Confédération paysanne dénonçait notamment la précarisation incessante des travailleurs saisonniers, conséquence logique de ce genre de réformes [2]. Une décision d’autant plus grave que les salarié-e-s saisonniers sont régulièrement confrontés à des pratiques illégales (versements tardifs de salaires, travail au noir) et à des conditions de travail pénibles.

[*Haro sur le coût du travail*]

Mais le gouvernement ne vise pas uniquement ces travailleurs et travailleuses « occasionnels ». Les salarié-e-s permanents sont eux aussi dans la ligne de mire, comme en témoignait déjà le discours de Bruno Le Maire en septembre : « Il y a des activités en France qui ne pourront pas rester si nous n’avons pas le courage de prendre les décisions politiques qui s’imposent en matière de coût du travail permanent. » Autrement dit, le traitement de choc doit s’appliquer à l’ensemble des salarié-e-s agricoles, indépendamment de leur statut. Le 11 octobre, Nicolas Sarkozy annonçait pour l’année 2012 une réduction drastique des charges sociales sur les salarié-e-s agricoles permanents, cette fois-ci.

Derrière cette politique d’exonérations – qui tombe à point nommé – sans doute faut-il voir les signes de stratégies électoralistes. Mais le gouvernement s’inscrit surtout dans la ligne idéologique qui est la sienne, au service de quelques grands exploitants isolés. Ces derniers vont profiter en priorité d’une baisse régulière des coûts salariaux, qui favorise un abaissement sans fin des prix à la production. En ce sens, la plupart des exploitants n’ont pas grand chose à gagner à ce jeu, où les capitalistes sont les vainqueurs désignés d’avance.

Le gouvernement tend à mettre en scène une opposition entre salarié-e-s et propriétaires. C’est en réalité pour ne pas aborder les questions essentielles : la garantie d’un revenu et de conditions de travail décentes pour l’ensemble des paysans indépendants ou des travailleurs et travailleuses agricoles, dont la position ne s’est guère améliorée au cours des dernières décennies, bien au contraire.

Boris (AL Paris Sud)

[1Le contenu du discours est disponible en ligne, sur le site du Ministère de l’agriculture : agriculture.gouv.fr

[2Dans un communiqué du 5 octobre, également reproduit sur le site de la Conf’ : www.confederationpaysanne.fr

 
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