Choc des cultures : Quel avenir pour l’Alliance écologique et sociale ?

Le projet de réunir syndicats et associations pour travailler ensemble aux questions des urgences écologiques et sociales était ambitieux et s’est concrétisé malgré de fortes réticences en interne. Le retrait de la CGT aurait pu en signer l’arrêt, mais localement la dynamique s’est maintenue sur certains territoires et l’alliance se poursuit.
C’était pourtant une bonne idée. Réunir la CGT, Solidaires, la FSU et la Confédération paysanne avec Greenpeace, les Amis de la Terre, Attac et Oxfam pour travailler aux urgences écologiques et sociales. En mettant de côté des divergences connues et sérieuses pour s’unir sur ce qui était partagé, une manière intelligente de rassembler.
Malheureusement dès le début des secteurs dans la CGT (néo-staliniens et/ou productivistes pro-nucléaires) se sont opposés à la dynamique au point d’en faire un cheval de bataille contre Martinez au 53e Congrès. Un vote à 50/50 des congressistes pour quitter l’AES est alors utilisé par les opposants pour construire une direction confédérale bicéphale avec Sophie Binet et Laurent Brun en champion du camp pro-nucléaire.
D’un point de vue strictement syndical, un travail en commun à grande échelle permettait de favoriser les rapprochements entre équipes militantes.
Ce travail unitaire via AES s’est d’ailleurs révélé bien utile dans les départements tout au long de l’année de mobilisation contre la réforme des retraites. De ce point de vue le retrait de la CGT est lourd de repli sur soi. D’autant que la Commission Environnement confédérale est paralysée par les productivistes et les intérêts mal compris de secteurs professionnels qui n’arrivent pas à intégrer une réflexion pourtant indispensable sur l’urgence écologique et la crise climatique.
Mais en vrai les difficultés que rencontre l’AES à se construire reposent aussi sur les autres composantes qui peinent non seulement à entraîner leurs militants dans la construction des AES par départements mais plus brutalement affrontent eux aussi des oppositions internes : chez Greenpeace où le compagnonnage avec la CGT fait débat, chez Solidaires où Sud-Industrie s’oppose au projet… En fait il a manqué une volonté politique plus forte à la tête des huit organisations fondatrices : en plus du permanent administratif mis en place, il aurait fallu détacher des responsables politiques de premier plan de chaque organisation pour un vrai comité de pilotage qui n’a jamais réellement fonctionné.
De fait l’AES n’aura mené qu’une vraie lutte nationalement autour de la réouverture de la papeterie Chapelle Darblay.
Des dynamiques locales intéressantes
Finalement l’AES n’existe que là où des militants se sont emparés du projet pour mener des combats propres à leurs territoires. Bien souvent les comités départementaux peinent à unir réellement les militants des huit organisations fondatrices, ne serait-ce que parce qu’elles sont parfois simplement non présentes localement.
En revanche et à géométrie variable ces comités rassemblent des militants divers inscrits dans des luttes écologistes locales. Dans quelques départements il reste une précieuse dynamique à l’œuvre qu’il faut continuer à renforcer.
Une réunion de rentrée des comités s’est tenue le 19 septembre dernier en visioconférence. La Creuse, l’Essonne, Paris, le Nord et le Rhône ont témoigné d’une activité réelle. D’autres ont avoué être un peu à l’arrêt, ne reposant plus que sur une seule organisation.
La bonne nouvelle c’est la place maintenue de plusieurs Unions départementales CGT dans ces comités avec un rôle moteur sur plusieurs départements.
Si l’AES à un avenir, ce sera par une reconstruction locale, département par département. L’expérience creusoise montre que l’implication réelle et sérieuse des syndicalistes dans les batailles écologistes permet d’apporter des réponses sociales et économiques complémentaires aux préoccupations naturalistes. Et en changeant le regard des naturalistes sur le syndicalisme cela ouvre des perspectives rassembleuses pour les combats à venir.
Jean-Yves (UCL Limousin)





