Politique

Covid-19 : Six ans de pandémie, et maintenant ?




Cela fait déjà six ans que le Covid-19 est apparu et a marqué nos existences. Alors que les politiques libérales nous ont contraints et contraintes à « vivre avec le virus », où en est la pandémie, et que pouvons nous mettre en place pour lutter pour l’autodéfense sanitaire ?

Malgré la proclamation de la fin de l’urgence sanitaire en août 2023 par le gouvernement, la pandémie de covid suit toujours son cours. Comme nous le montrions en décembre 2023 [1], notre camp social ne parvient toujours pas à intégrer dans sa réflexion la santé comme un objectif collectif. Pourtant, la pandémie a mis à nu les contradictions fondamentales du capitalisme. D’un côté, ce système prétendait protéger la vie humaine grâce aux prouesses de la science et de la technique ; de l’autre, il a subordonné ces avancées à la course aux profits.

Du sang sur les mains

Les vaccins, fruits d’un effort collectif, ont montré leur efficacité contre les formes graves du covid, mais leur usage a été miné par le manque de transparence, les promesses excessives et l’absence d’une stratégie collective cohérente. Faute d’avoir mis en œuvre des mesures sociales et techniques de réduction de la transmission – par la ventilation des lieux clos, la gratuité des protections, la réorganisation du travail et la mise en commun des savoirs – le virus a continué à circuler, favorisant l’émergence de nouveaux variants, affaiblissant la portée même des vaccins et sapant la confiance populaire. Chacun et chacune a été renvoyée à sa responsabilité individuelle, comme s’il s’agissait d’un choix personnel et non d’un enjeu social. C’est sur ce terrain que les charlatans, complotistes et politiciens réactionnaires se sont aussi propagés, exploitant la colère populaire au lieu de la diriger contre sa véritable cause : le Capital qui marchandise la vie.

Emmanuel Macron et sa stratégie du « vivre avec » ont du sang sur les mains [2]. Les classes dominantes ont délibérément organisé une gestion sociale de la mort : celles et ceux jugées comme « improductifs » – personnes âgées, handicapées, précaires – ont été sacrifiées au nom du maintien de l’économie. Les campagnes de vaccinations contre le covid sont de moins en moins médiatisées et sont présentées comme n’étant utiles que pour les « personnes à risque ». Ce ciblage montre un validisme et un certain mépris pour ces personnes : elles seules doivent se préoccuper de leur santé et les autres qui se vaccinent pour les protéger ne le feraient que par bonté. Le Québec, en rendant la vaccination payante (pour un coût de 150 à 180 dollars canadien) pour les personnes « non à risque » [3], va encore plus loin dans la mise en danger.

Selon une récente étude [4], plus d’une personne sur trois infectée par le SARS-CoV-2 développe des séquelles à long terme et environ une personne sur dix souffre d’un covid long. Cette nouvelle maladie chronique peut toucher tous les organes et provoquer une grande diversité de symptômes, notamment la perte de mémoire, parfois invisibles ou différés de plusieurs semaines ou mois après l’infection. De plus, l’infection initiale peut être asymptomatique, rendant le lien avec le covid long difficile à établir, surtout dans un contexte médical où le déni de la maladie persiste.

Depuis la reconnaissance tardive du phénomène, c’est la mobilisation des malades eux et elles-mêmes qui a permis de lever le voile sur cette maladie chronique et insidieuse. Des collectifs de personnes atteintes de cette maladie voient le jour comme Winslow [5].

Depuis 2023, la France a cessé les comptages de cas covid. Les seules données disponibles sont celles de 2020 2022 et l’analyse des eaux usées du dispositif de surveillance nationale Sum’eau. Pour pallier ce manque d’informations, l’association ARRA fait un suivi régional de ces données et le collectif Winslow santé publique met à disposition une multitude d’articles et de matériel sur le covid.
WINSLOW SANTÉ PUBLIQUE

L’État a laissé pour compte des milliers de personnes incapables de reprendre le travail, ni reconnues ni indemnisées. Face à cette pandémie toujours actuelle, nous ne pouvons pas faire confiance à la classe politique et aux capitalistes. Ces mêmes qui organisent des pénuries de médicaments pour faire du profit. La politique de gestion du virus est maintenant individualisante et validiste : c’est aux personnes « fragiles » de mettre un masque, de se vacciner, d’éviter la foule… En tant que révolutionnaires, nous nous devons d’appliquer une certaine discipline sur nos pratiques et c’est à nous de construire collectivement une réelle autodéfense sanitaire.

Que faire ?

Lorsque nous organisons des événements collectifs comme des assemblées générales ou réunions publiques, le port du masque obligatoire (FFP2 et bien ajusté) est efficace pour se protéger du covid collectivement [6]. L’aération de la salle est aussi indispensable pour améliorer la qualité de l’air que l’on respire, et lorsque c’est possible on peut installer des purificateurs d’air qui se révèlent efficaces pour filtrer l’air [7]. Il est aussi important de proposer une visioconférence pour les personnes qui ne peuvent pas se déplacer. Ces mesures qui peuvent paraître individualistes ne sont efficaces que lorsqu’on les pense collectivement. Se masquer, c’est aussi protéger les personnes qui ne peuvent pas porter de masque (par exemple, les personnes qui ont recours à une assistance respiratoire ou ayant un fauteuil électrique se pilotant par la bouche).

Pour pouvoir appliquer cette autodéfense sanitaire, nous ne pourrons jamais nous appuyer sur l’État. Depuis le début de la pandémie, nous voyons émerger des Mask blocs dans beaucoup de villes en France. Ces collectifs militent pour une autodéfense sanitaire quotidienne et prônent le retour du port du masque dans l’espace public (transports en commun, supermarchés, etc.). Il est possible de les contacter pour se fournir gratuitement en masques FFP2 ou purificateurs d’air pour sécuriser nos événements publics. Enfin, la vaccination est toujours possible, et toujours gratuite ! La campagne hivernale 2025 est en cours et durera jusqu’au 31 janvier 2026. Il suffit généralement de demander le vaccin en pharmacie, le plus souvent sans même avoir besoin d’un rendez-vous.

Ces efforts sur le court terme sont l’expression directe de la solidarité de classe de réduction des risques, mais ne sont pas de réelles solutions. Le problème est plus structurel et cette crise sanitaire n’était pas évitable dans notre société capitaliste. On le voit dans nos lieux de travail ou d’étude : rien n’est fait pour améliorer la qualité de l’air et limiter la circulation du virus. L’attaque du gouvernement sur les arrêts maladie – prétextant des abus – en est un exemple criant : les travailleurs et travailleuses ont donc maintenant le choix entre perdre du salaire ou aller au travail en étant malade et infecter leurs collègues. Il en est de même pour nos écoles : rénover les systèmes de ventilations permettraient de limiter les contaminations et par la même occasion réduire l’absence à l’école [8]. C’est à nous d’inscrire ces revendications partout dans nos luttes, afin de faire de l’autodéfense sanitaire un vrai sujet politique et collectif.

Antoine (UCL Alsace)

[1«  Pandémie de Covid-19 : Où en est-on de l’autodéfense sanitaire  ?  », Alternative libertaire, décembre 2023.

[2Phoenix Ketchum, «  Ce que le COVID a à voir avec l’eugénisme  », Medium.com, 16 septembre 2025.

[3Florence Morin-Martel, «  Le vaccin contre la COVID-19 ne sera plus gratuit pour tous cet automne  », Le Devoir, 17 septembre 2025.

[5Pour plus d’information, voir le site du collectif, Winslow.fr.

[6B. Murdoch, «  Comment le déni de la transmission aérienne du Covid a brisé le monde  », traduction disponible sur Winslow.fr.

[7Pour plus d’information, voir la page «  Purificateurs d’air  » du site de l’association ARRA.

[8«  Poor air quality in classrooms  », The Irish Times, 4 septembre 2025.

 
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