Irlande : Rébellion massive contre l’ultralibéralisme




Manifs monstres et syndicats pas forcément loyaux envers les salarié-e-s, la crise en Irlande nous donne peut être un petit avant-goût de ce qui nous attend en France. Les communistes libertaires sont en pointe dans la lutte.

Est-ce la fin du « tigre celtique » ? C’est en tout cas ce dont s’est inquiété le journal très conservateur The Economist quand la crise est arrivée en Irlande. C’était en août dernier. Six mois plus tard, le 21 février, première secousse sociale : 120 000 personnes défilaient à Dublin à l’appel des syndicats.

Résumé du film irlandais : même motif, même punition que les subprimes états-uniennes. D’un côté une bulle immobilière entretenue par les banques, une course aux prêts hypothécaires, un marché de la construction qui grimpe en flèche, sans rapport avec le marché réel. De l’autre, le taux d’endettement des ménages irlandais devenu l’un des plus élevés de l’OCDE, et une dette publique qui gonfle. Ajoutons l’effet euro : baisse du pouvoir d’achat et baisse des exportations. Tout est réuni pour la catastrophe. On envisage aujourd’hui une croissance négative du PIB de 5 % et un taux de chômage pour 2009 de 10 %.

Pour y répondre, le Premier ministre irlandais a négocié longuement avec les « partenaires sociaux »… qui ont rejeté ses propositions de coupes budgétaires. Il a alors décidé et de réduire les salaires de la fonction publique en opérant des prélèvements sur les retraites, et d’envisager une augmentation d’impôts ! Résultat : les manifs monstres du 21 février.

Ça, c’est la version officielle. En fait, les communistes libertaires du Workers Solidarity Movement (WSM), engagés à fond dans la contestation, soupçonnent fortement la confédération syndicale ICTU d’avoir elle-même suggéré à Cowan l’idée des prélèvements sur les retraites de la fonction publique, plus « vendable » qu’une baisse de 10 % des salaires comme le proposait Cowan.

Aujourd’hui les manifestations qui secouent l’Ile verte pointent du doigt les scandales du système : tandis que les transports publics de Dublin sont menacés de coupes sombres (290 postes et 10 % de sa flotte menacés), le gouvernement octroie une concession de gaz à Shell sur la côte ouest du pays (10 milliards d’euros de recette en vue pour le pétrolier)

D’un côté on va baisser le salaire de 5000 junior doctors (stagiaires et internes) des hôpitaux avec la faveur de la Sécu, pour économiser 43 millions d’euros. De l’autre on consent 8 milliards d’allègements fiscaux pour la construction de cliniques privées. L’Enseignement supérieur est menacé de « rationalisation » (suppression de plusieurs milliers de postes à terme), tandis que 103 millions par an sont octroyés à l’école privée.

Avec un quotidien qui se dégrade, malgré des syndicats réformistes en cheville avec l’État, et confortés par la victoire du « non » au traité de Lisbonne en juin dernier, les Irlandaises et les Irlandais poussent aujourd’hui un cri que l’on entend également ici : « Ce n’est pas à nous de payer leur crise ! »

Et à Brian Cowan qui veut « restreindre nos salaires et modérer nos exigences », le WSM répond : « Agissons pour restreindre leurs profits et les empêcher à jamais de profiter de nos vies ! »

Benjamin (AL 78)

 
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