Mutadis Consultants : La désinformation nucléaire




Accepter les risques nucléaires et s’y préparer, ou tout mettre en oeuvre pour les éliminer ? Deux questions que n’ont plus besoin de se poser les autorités ni, cela va de soi, le lobby nucléaire, car des deux éventualités, c’est évidemment la première qui a été choisie, au mépris de notre santé, de notre vie, et de l’avenir de notre planète.

Mais les opposants au nucléaires refusant de se laisser museler, leurs adversaires industriels et institutionnels cherchent à diminuer leur audience que la catastrophe de Tchernobyl a accentuée, et à faire accepter aux populations les installations nucléaires et les risques qui y sont associés.

Le tour est joué en deux mots : Mutadis consultants.

Avec Mutadis consultants, plus besoin de faire appel, comme autrefois, à la force brutale ni aux lacrymos des CRS : on a choisi « la concertation » qui en toute perversité fera accepter « en douceur » les projets assassins du lobby nucléaire et des gouvernements. On préfère s’attaquer subrepticement aux esprits.

L’échec de la « mission granite »

En 1999, le site de Bure est acheté à grands coups de millions aux élus de la Meuse. Ce sera le premier « laboratoire » d’enfouissement des déchets nucléaires à haute toxicité radioactive en sous-sol argileux. Un second laboratoire est programmé en sous-sol granitique. Trois hauts fonctionnaires sont chargés de mener les recherches du meilleur site dans le plus grand secret : c’est la « mission granite ».

Mais coup de théâtre : avant même que les communes concernées ne soient averties par les autorités, le Réseau Sortir du nucléaire réussit à se procurer les cartes détaillées et le nom des 15 sites potentiels retenus par l’ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) pour l’enfouissement des déchets nucléaires à vie longue et à haute activité. Victoire éclatante pour les anti-nucléaires.

Mais la contre-attaque du lobby nucléaire est déjà à portée de main : c’est Mutadis consultants, déjà en place dans la « mission granite » et dont le rôle encore mineur a été d’organiser la concertation (traduire par mystification !) avec les associations pour donner un costume démocratique aux décisions du lobby nucléaire. C’est ce rôle qui va être renforcé.

Nouvelles méthodes... pour renforcer le nucléaire

Plusieurs groupes de recherche ont été mis en place pour faire accepter aux populations les installations nucléaires et les risques qui y sont associés.

Les principaux sont :

  • Le CEPN (Centre d’étude sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire) : créé en 1976, il a pour rôle l’évaluation des risques pour la santé et l’environnement face à l’électronucléaire, et l’optimisation de la protection radiologique. Notre santé et notre environnement sont entre des mains expertes : EDF, Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, Centre de l’énergie atomique, Cogema !
  • Au niveau européen, le Programme européen Trustnet, dont le secrétariat est assuré par... Mutadis consultants : 80 participants (fonctionnaires, associatifs, chercheurs, industriels...) dont le rôle est la réflexion sur la gestion sociale des risques industriels, naturels et sanitaires en Europe. On réfléchit sur les risques et leur gestion, mais on ne parle nulle part de les éviter ! En fait, le seul objectif de Trustnet est de parvenir à faire accepter une activité ou une installation à risque par la population, les associations, les élus, en faisant appel à des stratégies adaptées :
    • la concertation (mystification) appelée sans ironie « confiance mutuelle », qui va démontrer que l’implantation d’une activité à risque se justifie (emploi, manne financière, participation citoyenne à la décision ).
    • Le projet européen COWAM. Le souci de COWAM : « les populations se mobilisent quand on veut leur imposer un site de stockage des déchets nucléaires. Comment s’y prendre pour empêcher le développement de telles mobilisations ? »

Eh bien, c’est simple puisque c’est encore Mutadis : il suffit se s’appuyer sur « la société civile » et sur tous les acteurs concernés par la gestion des déchets nucléaires : représentants des communautés locales, élus, associations, experts en sciences humaines, autorités nationales, producteurs de déchets... Peu importe leurs compétences ou leur légitimité. Ce qui compte, c’est de les rassembler pour faire croire que la réalisation d’un projet est l’aboutissement d’un processus démocratique et cacher qu’elle n’est rien d’autre qu’un crime organisé qui engraisse le lobby nucléaire, soutenu par la Commission européenne qui souhaite imposer à tous les pays nucléarisés de l’Union un site d’enfouissement profond de ces déchets.

Le piège de la concertation

Cette stratégie perverse doit inciter le mouvement antinucléaire à redoubler de vigilance et à se méfier des concertations-manipulations.

Celles-ci permettent en effet le repérage systématique des opposants au nucléaire, et plus particulièrement leur classement selon le risque qu’ils représentent pour le lobby. Les militants anti-nucléaires sont déjà pour la plupart soigneusement identifiés et répertoriés. Travail de titan pour CEPN et Mutadis, mais fort utile puisqu’il leur permet d’éviter toute erreur dans l’organisation de leurs concertations : selon son profil, le militant associatif jugé comme « acteur à risque » sera écarté, et celui qui est jugé comme potentiellement manipulable sera retenu et utilisé.

Ces méthodes ont pour grand avantage de diviser les mouvements d’opposition. Quant aux scientifiques, aux ONG, aux associations, aux écoles spécialisées, gare à leur instrumentalisation ! Ainsi, l’Université de technologie de Compiègne et l’Institut national d’agronomie de Paris-Grignon ont été recrutés par Mutadis.

Tchernobyl, pas si grave que ça !

Mutadis, payé grassement par les deniers publics, les nôtres, et avec l’aval du ministère de l’Environnement, se charge de banaliser le problème de l’enfouissement des déchets nucléaires et de le faire passer pour un risque « minimisable ».

Mais il y a un gros grain de sable qui est venu enrayer la machine à désinformer : Tchernobyl. Et Tchernobyl est durablement incrusté dans les esprits. Qu’à cela ne tienne, on va procéder au lavage des cerveaux qui s’impose pour laisser le champ libre aux projets monstrueux, mais riches de profits à engranger, des autorités et des industriels du nucléaire. Dédramatiser les conséquences de Tchernobyl, nier leur caractère catastrophique (c’est un accident !), quitte à imposer dans l’opinion d’aberrantes contrevérités, c’est faisable. Et l’Europe de l’Ouest, France en tête de peloton avec son puissant lobby s’y est déjà engagée : ce sont les programmes Ethos et Core, financés par l’argent public et soutenus par la Commission européenne.

Michel Fernex, professeur honoraire de la Faculté de médecine de Bâle, a beau affirmer (Politis, 13-12-03) que « si les conséquences sanitaires de Tchernobyl étaient connues, elles mettraient fin au programme nucléaire mondial », on nous assène sans pudeur que « les conséquences d’un désastre nucléaire seraient bien moins graves qu’on ne le pense généralement. »

Pour nous cacher l’étendue des conséquences de Tchernobyl et ainsi réussir à nous faire accepter, en la minimisant, l’éventualité d’un nouvel « accident » nucléaire, il fallait un masque et des garanties : le lobby nucléaire les a trouvés en faisant accepter à la Biélorussie de démettre de ses fonctions l’institut indépendant de radioprotection Belrad, dirigé par le professeur Nestorenko. Pour le remplacer par les experts français de son programme Ethos !

Les vérités du professeur Nesterenko auraient gêné les industries nucléaires dans leur recherche de profit. Les mensonges des experts d’Ethos, eux ont l’effet contraire.

Ethos sert à démontrer qu’il est possible de bien vivre dans les zones contaminées, que les conditions de vie peuvent y être améliorées, que les habitants doivent simplement apprendre à vivre au quotidien avec la radioactivité comme « une composante nouvelle de l’existence ». En clair, si on peut vivre à Tchernobyl, cela veut dire qu’on pourra aussi s’habituer à vivre en Europe dans un territoire imbibé de césium 137 en cas de défaillance d’une autre centrale nucléaire !

Nous savons bien que la seule protection contre les risques nucléaires est l’abandon pur et simple de l’industrie nucléaire. Mais l’Union europénne et le lobby nucléaire y ont trop de marchés juteux à perdre.

Bon appétit !

Est-ce un hasard si le lobby agroproductiviste fait son apparition dans le programme du lobby nucléaire Ethos ?

Les grands céréaliers Français, l’association Sol et Civilisation, étroitement liés à la FNSEA, y sont aux côtés de EDF et Cogema. Qui se ressemble s’assemble, mais dans quel but ?

C’est limpide : le profit ! Des productions agricoles sont contaminées ? Pour ne pas perdre d’argent, on va tout de même les écouler et les faire ingérer aux populations. Certes, on connaît parfaitement les dangers que cela représente pour l’humanité : du sol imbibé de césium 137 au lait que les mômes en particulier vont consommer, via la plante que la vache a broutée, c’est toute la chaîne alimentaire qui est contaminée. En Ukraine seuls 90000 hectares (à peine 1% des terres contaminées !) sont exclus de toute production agricole, sur 8 millions d’hectares au moins qui ont été soumis à la contamination. Voilà des chiffres qui doivent convenir aux grands producteurs agricoles dans l’hypothèse d’un accident nucléaire en France.

Faut-il se préparer à la catastrophe nucléaire ou bien empêcher qu’elle ne survienne ?

L’expérience montre que rien ne peut limiter les conséquences d’une catastrophe nucléaire. Les programmes de réhabilitation des zones contaminées sont des mensonges : l’existence d’un seuil en dessous duquel la radioactivité n’est pas dangereuse n’a jamais été démontrée. La dangerosité de l’ingestion de produits alimentaires contaminés est évidente. Nous ne connaissons pas encore les effets sur l’organisme et l’environnement des autres produits de fission que sont l’actinium ou le neptonium. Les distributions de pastilles d’iode sont faîtes pour abuser les populations. Elles ne protègent en rien des autres produits qui seront disséminés. Pastilles ou pas, les populations les plus proches du lieu de l’accident mourront.

Nous continuons donc à dire STOP ! Fermons au plus vite toutes les installations nucléaires. Refusons tous les projets que tente de nous imposer le lobby nucléaire : l’enfouissement des déchets à Bure dans la Meuse, le réacteur nucléaire EPR de Flamanville en Basse Normandie, l’usine de combustible nucléaire qui doit remplacer Pierrelatte.

Le nucléaire ne peut en rien représenter une alternative à la crise de l’énergie. Les réserves planétaires d’uranium seront épuisées vers 2050. Alors, pourquoi continuer à multiplier les risques ?

Le nucléaire est une industrie injustifiable qui doit disparaître au plus vite.

Réseau Sortir du nucléaire

Résumé par Maïté (AL Alsace)


Deux grands rassemblements antinucléaires en 2005 et 2006

A l’automne 2005, rassemblement international près de Bure (Meuse) contre la construction en cours du site d’enfouissement des déchets nucléaires les plus dangereux.

Les 15 et 16 avril 2006, à l’occasion des 20 ans de la catastrophe de Tchernobyl, manifestation internationale dans le Cotentin, près de Flamanville, site choisi pour l’implantation d’un nouveau réacteur EPR.

 
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