A Contre Courant : Avec hamster agité, c’est la cata assurée




Chaque mois, le mensuel Alternative libertaire reproduit l’édito de la revue alsacienne À Contre Courant, qui de son côté reproduit l’édito d’AL. Pour contacter ces camarades : ACC, BP 2123, 68060 Mulhouse Cedex.


C’est Cabu qui l’a fait remarquer, dans une illustration féroce : on a mis « un hamster à l’Elysée ». L’animal politique s’y agite frénétiquement pour faire tourner à toute vitesse la cage libérale où il s’est enfermé.
Spectacle ridicule, et même inquiétant. Mais spectacle applaudi. Pas seulement par celles et ceux qui ont choisi l’acteur de devant-de-scène de ce cirque pitoyable : au nombre des supporters et supportrices, on trouve aussi quelques éléphants roses barrissant d’admiration ; les encouragements qu’ils prodiguent poussent notre hamster à forcer encore le rythme. Patrons, télés, radios, journaux exultent parfois ; le tournoiement en devient vertigineux.

Ne demandez pas à Sarko de ralentir un peu, pour réfléchir ; il aurait fallu qu’il ait un peu de culture pour ça. Il ne veut pas, et ne peut pas le voir : échec il y aura, inévitablement. Ses trépignements accélérés y conduisent plus rapidement que ne l’aurait fait une certaine modération qu’auraient réussi à suggérer une opposition en état de s’opposer.
L’échec pourrait aussi bien venir de l’économie globale – comme l’ont rappelé quelques craquements financiers – que des contradictions que Sarko lui-même aura approfondies en promettant tout et le contraire de tout, à seule fin inavouée de privilégier encore les plus privilégiés.
Voilà donc un système mal en point, échappant au contrôle de « dirigeants » déboussolés qui ne dirigent plus rien ; le scénario devrait nous réjouir. Mais l’envers du décor est moins amusant : la cage pivotante d’hamster agité actionne une machine à broyer nos acquis sociaux et sème un vent mauvais où se dessèchent libertés et solidarités, sans que, pour l’instant, les victimes aient une réaction à la hauteur des sévices subis. Dans leur majorité, les couches populaires et salariées semblent paralysées, voire fascinées. Médias, appareils et faux amis lui ont certes fait confondre élection et insurrection, action syndicale et grève-éteignoir, structuration partidaire et élan progressiste, écologie et poudre aux yeux. Mais quand on parle d’une nécessaire épreuve de force contre les possédants, ou quand on vante la pertinence de coordinations, celle d’un mouvement social autonome ou la cohérence d’une écologie politique, on a plutôt l’impression d’effrayer que d’intéresser. Une lutte qui ambitionnerait de profonds changements n’apparaît guère crédible ; seules des luttes défensives ou qui visent quelques aménagements humanitaires mobilisent encore, sans bien sûr empêcher qu’au fil du temps, sur le fond, les régressions et les reculs s’accumulent.

La prévisible cata de Sarko ne se transformera pas forcément en victoire pour les opprimé-e-s si ne surgit pas au bon moment une cohérente et forte remise en cause du désordre établi. Mais où sont les prémices d’une pareille radicalité dans les rangs du prolétariat ? Si elles existent, elles restent bien cachées sous les strates du règne idéologique de la marchandise, de la concurrence et de l’individualisme. Pour garder de l’ardeur au combat, on en est réduit à constater que, dans l’Histoire, les prémices de la subversion sont généralement restées invisibles, même à un œil exercé.

 
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