Lire : Cerutti, « D’Alger à mai 68, mes années de révolution »




D’Alger à mai 68, mes années de révolution est un récit à caractère autobiographique, édité récemment par les Spartacus, et signé par François Cerutti. Ce dernier a été l’un des animateurs du groupe « communisateur » que se regroupe autour de la Vieille Taupe n°1 (rien à voir avec la librairie négationniste qui a repris ce nom quelques années plus tard), et il collabora aux Cahiers de Spartacus.

Dans cet ouvrage, il retrace le parcours d’une vie, consacrée à l’activité révolutionnaire, de la lutte pour l’indépendance de l’Algérie aux mouvements de mai 68 et à l’agitation post-68.

François Cerutti, né en 1941, est issu d’une famille de pieds-noirs plutôt aisée. Suite au « suicide » de son père, colonel de l’armée française en 1956, deux ans avant le coup d’État qui institue la Ve République, il est envoyé faire ses études en France métropolitaine à l’âge de 15 ans. Il y découvre la lutte contre l’Algérie française, pour l’indépendance algérienne grâce à son frère, proche de l’UEC. Suite à des inscriptions géantes à Aix en faveur de l’indépendance algérienne, il passe trois mois en prison. Passé à la clandestinité tout en critiquant la bureaucratisation du PCF et de l’URSS, il se réfugie au Maroc en 1961 pour échapper au service militaire. Il se met au service de la rébellion algérienne avec le soutien de l’état marocain. Au cours de ce séjour au Maroc, il devient trotskiste. Lors de l’indépendance algérienne, il revient en tant que « pied-rouge » et participe au secteur autogéré de l’économie algérienne. Commencent alors des pages uniques du récit, décrivant son expérience dans ce secteur, les acquis, les limites. En parallèle, il poursuit ses activités dans un groupe trotskiste. Il quitte l’Algérie en 1965 après le coup d’État de Boumediene et la « normalisation ».

De retour en France, il fait son service militaire, au cours duquel il est l’un des instigateurs d’une grève d’appelés, ce qui le mène à nouveau en prison. Il est libéré juste à temps pour participer aux évènements de mai 68, plus en spectateur qu’acteur. Il s’implique dans la création du Groupe de liaison et d’action des travailleurs qui a pour objectif de relier étudiants et travailleurs dans une optique conseilliste. Ce groupe s’effilochera rapidement après la fin de mai 68. Après 68, il sera partie intégrante de la mouvance communisatrice et contribuera aux nombreux débats qui la traversent.

Cet ouvrage est intéressant, car il nous donne un aperçu des années 60 et surtout de la subjectivité de ces années-là, et de la façon dont les révolutionnaires de ces années les ont traversées. L’évolution de Cerutti, de l’anticolonialisme proche de l’UEC à la communisation en passant par le trotskisme est assez révélatrice de l’époque. Les années de résistance contre l’Algérie française sont intéressantes par le témoignage amené, qui est assez exceptionnel, surtout la partie sur la participation au secteur autogéré de l’économie. C’est un témoignage saisissant d’une époque révolue…

Matthijs (AL Montpellier)

• François Cerutti, D’Alger à Mai 68 : Mes années de révolution, Les Amis de Spartacus, 2010, 165 p, 13 euros

 
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