Lire : Luz, « Les Mégret gèrent la ville »




Nous sommes le 9 février 1997. Avec 52,47 % des voix exprimées, Catherine Mégret, candidate FN, devient maire de Vitrolles après que le scrutin de 1995 ait été annulé parce que son époux, Bruno, a dépassé son budget de campagne et a en conséquence été déclaré inéligible un an. Toujours est-il que, ce jour-là, Vitrolles rejoint Marignane, Orange (toujours aux mains de Bompard en 2014) et Toulon dans le club des communes passées sous la coupe du FN. Il n’en faut pas plus à Luz, dessinateur alors syndiqué à la CNT et qui sévit dans les colonnes d’un Charlie Hebdo nettement plus à gauche qu’aujourd’hui, pour commettre une inénarrable série de strips hebdomadaires chroniquant avec tout le mordant requis la première année de règne de la Gourde (Catherine) et du P’tit rat (Bruno).

L’album, paru en 1998, passe au crible les premiers pas (de l’oie) de ce frontisme « milicipal » : nettoyage des rayons de bibliothèque, débaptisation des rues, guerre ouverte avec la salle de spectacle du Sous-marin, « préférence vitrollaise », violence et racisme au quotidien, mais aussi conflit entre Mégret et « le Gros Pen »… tout y est. Chaque strip est un véritable défouloir en sept cases, bâtit systématiquement sur un échange savoureux tout autant que débile – même lorsqu’il s’appuie sur d’authentiques citations – entre la Gourde et le P’tit rat. En pleine époque Ras l’Front, la bédé, et elle leur est dédiée, n’oublie pas les résistants à l’ordre mégretiste, qui réussissent à jouer au couple infernal quelques tours pendables. Avec Luz, aucun doute, l’humour antifasciste existe. Et quand vous direz à nouveau, « pour une dent, toute la gueule », vous ne pourrez que penser à ses Mégret de papier.

Théo Rival (AL Orléans)

 Luz, Les Mégret gèrent la ville, Hors-série Charlie Hebdo, 1998, 84 pages.

 
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