Après le 12 avril : Reprendre la main face à l’austérité




La mobilisation unitaire du 12 avril contre la politique du gouvernement et l’extrême droite a été un succès. Il faut poursuivre la mobilisation et la radicaliser pour mettre le Valls et sa clique à genoux.

On peut se féliciter de la manifestation du 12 avril qui a permis de réunir, dans la rue, un grand nombre de forces associatives, syndicales et politiques qui s’opposent à la fois à la politique d’austérité du gouvernement et à la menace rampante de l’extrême droite. Étant donnée la morosité ambiante, 50 000 personnes qui marchent ensemble pour réclamer l’égalité et le partage des richesses, ce n’est pas rien. Mais si l’objectif est bien de faire reculer le gouvernement et de reprendre la main face à l’austérité, cela ne sera pas suffisant. Pour stopper les capitalistes dans leur élan et mettre un terme aux rêves du Medef, plusieurs défis devront être relevés.

Lutter ensemble contre l’austérité

Le premier défi qui nous attend, c’est celui de l’unité : la résistance est aujourd’hui encore trop faible pour qu’on puisse se permettre d’avancer en ordre dispersé donc, pour espérer l’emporter, il faut maintenir un cadre national unitaire contre l’austérité et pousser à ce que les organisations syndicales et les associations de lutte prennent toute leur place dans le combat à mener. Pour cela, il est nécessaire que les grossières manœuvres d’instrumentalisation du Front de gauche cessent : aucune organisation du mouvement syndical ou du monde associatif n’acceptera de servir durablement de marchepied au Parti communiste ou au Parti de gauche.

La meilleure manière de faire taire ces prétentions hégémoniques reste encore d’assister aux réunions unitaires en tapant du poing sur la table pour faire entendre les exigences d’autonomie du mouvement social et de respect du pluralisme. Plus la diversité des organisations non-satellisées par le Front de gauche sera représentée, moins celui-ci aura les coudées franches pour utiliser syndicats et associations comme courroies de transmission. Les forces antifascistes, libertaires, autogestionnaires ont donc tout intérêt à prendre part à la mobilisation et à ne pas mener une politique de la chaise vide.

Pour sa part, Alternative libertaire continuera d’interpeller les anticapitalistes afin qu’ensemble nous fassions entendre un autre son de cloche que celui du Front de gauche, en défendant une ¬réelle alternative aux illusions républicaines, réformistes et nationalistes.

Se donner les moyens de résister

Le deuxième défi, c’est celui de l’élargissement de la mobilisation : la manifestation nationale du 12 avril, essentiellement militante, a permis de marquer symboliquement la constitution d’un front de lutte contre l’austérité qu’il va à présent falloir développer et construire localement. Et si notre détermination à combattre le gouvernement et à juguler l’alarmante progression de l’extrême droite n’est pas qu’une posture, nous allons devoir trouver autre chose qu’une nouvelle manifestation nationale dans six mois ou qu’une « votation citoyenne » à l’automne, sans quoi nous allons être pris de vitesse par un Premier ministre qui multiplie les cadeaux au patronat et mène tambour battant une violente politique antisociale. Les nouvelles mesures d’austérité annoncées par Manuel Valls peuvent du moins nous faire comprendre que le gouvernement ne s’arrêtera pas en si bon chemin et que, s’il ne rencontre aucune résistance, il continuera à raboter les prestations sociales, à saigner les services publics et à enfoncer la population dans la précarité.

Dans ce contexte, on voit clairement que les pétitions, votations et autres initiatives citoyennes ne sont pas à la hauteur et que c’est à un autre niveau de confrontation avec le pouvoir que nous devons nous préparer. Pour cela, afin de poursuivre sur la lancée du 12 avril, il est nécessaire de proposer rapidement une autre date de mobilisation en juin, après des élections européennes qui risquent malheureusement d’accaparer une partie des énergies militantes au cours du mois de mai. Annoncer dès maintenant une date permettra aux collectifs locaux, qui avaient jusque là principalement servi à organiser la montée nationale du 12 avril, de prendre réellement du service : meetings, réunions publiques, diffusions régulières de tracts seront nécessaires pour entretenir un climat d’agitation contre l’austérité. En effet, si nous voulons convaincre une part importante de la population de résister à l’austérité, il va d’abord falloir mener la bataille idéologique en répondant point par point à l’argumentation du gouvernement : alors qu’on nous rabâche qu’il faut réduire le « coût du travail », nous devons sans relâche dénoncer le coût du capital.

C’est le sens des campagnes syndicales menées respectivement par la CGT et Solidaires (voir page précédente). Mais il va également falloir proposer des mesures concrètes comme l’arrêt des expulsions et des coupures d’eau ou d’électricité, la baisse des loyers, la régularisation des sans-papiers, la réquisition des logements vides, etc. C’est pourquoi dès maintenant, nous devons réfléchir aux propositions que nous pourrons mettre sur la table, que ce soit dans les ¬réunions unitaires nationales ou dans les collectifs locaux.

Ces mesures d’urgence devront nécessairement s’articuler avec d’autres formes de lutte : occupations de lieux symboliques (locaux du PS ou du Medef), pression maximale sur les députés qui voteront les mesures antisociales que nous combattons (en perturbant leurs déplacements ou en bloquant leurs permanences pour leur demander des comptes), réquisitions de logements en lien avec les associations de lutte, etc., sont autant de moyens de se faire entendre et d’élargir la mobilisation au-delà des milieux militants « traditionnels ».

Sortir des sentiers battus pour espérer l’emporter

À ce titre, les mobilisations massives qui ont eu lieu en Espagne, au Portugal ou en Grèce peuvent nous servir d’exemples et nous indiquer la marche à suivre. Car l’enjeu c’est bien de montrer qu’il est possible de s’organiser pour lutter contre l’austérité en développant des pratiques de solidarité concrète.

Il n’y a pas de recette miracle pour stopper le gouvernement mais nous devons dès à présent mettre toutes les chances de notre côté pour renverser la vapeur. Pour cela, partout où nous intervenons, nous devons convaincre que seules des actions d’envergure, portées par un mouvement social en ordre de bataille, et adossées à des grèves, seront en mesure de mettre un coup d’arrêt à des politiques d’austérité qui ne visent qu’à préserver le système capitaliste pour le malheur du plus grand nombre.

Benjamin Bakin (AL Paris Nord-Est)

 
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