Société : Il n’y a pas de classes sans lutte - Les rapports sociaux de classe d’Alain Bihr, éditions page deux




La nouvelle livraison de notre camarade Alain Bihr n’est pas consacrée aux classes sociales, mais aux rapports sociaux qui les déterminent. L’analyse proposée, parce qu’elle s’inscrit dans la perspective marxiste, s’oppose nécessairement à la valorisation idéologique de l’individu promue par l’école sociologique de l’individualisme méthodologique.

L’auteur s’appuie sur quatre idées-forces : les rapports sociaux de production capitaliste prévalent sur tous les autres rapports sociaux ; les rapports sociaux prévalent sur la structure classiste des sociétés ; les rapports sociaux de production sont tout à la fois d’exploitation, de domination et d’aliénation ; il n’y a pas de classes sans lutte des classes.

En conséquence de l’analyse du capital comme rapport social de production, Alain Bihr va distinguer quatre classes. Ce sera la bourgeoisie, le prolétariat mais aussi l’encadrement et la petite-bourgeoisie dont l’existence autorise la constitution d’alliances de classes susceptibles de donner, comme le dirait Gramsci, des « blocs sociaux » hégémoniques.
Ces alliances, manifestent le caractère conflictuel des sociétés de classe et le risque d’une décomposition toujours possible (en fractions de classe, couches ou catégories). Cela induit la distinction entre la situation objective de classe des agents selon leur position dans le procès de production capitaliste et leur position subjective.

L’Etat est vu comme résultant de la lutte des classes et comme « unité transcendante » visant (sous le nom d’intérêt général) la pacification et la neutralisation des rapports de classe joue un rôle stratégique dans la constitution des blocs hégémoniques. Les « classes en soi » peuvent donc être aussi des « classes pour soi » qui se mobilisent pour peser et orienter, politiquement mais aussi culturellement, sur l’organisation générale de la société.

Le privilège accordé au prolétariat comme classe universelle impose le choix politique du communisme, quand les idéologies du libéralisme, du social-étatisme et du corporatisme ne relèvent que de l’imposition générale des intérêts très particuliers de blocs sociaux dominés par une classe hégémonique (respectivement la bourgeoisie, l’encadrement et la petite-bourgeoisie). En conclusion, l’évocation des « rapports de reproduction » sous lesquels Alain Bihr regroupe les rapports sociaux de sexe et de génération est l’occasion pour l’auteur de rappeler la surdétermination des rapports sociaux de production sur l’ensemble interdépendant des rapports sociaux prévalant dans les sociétés de classes. En regard, par exemple, de certaines analyses féministes, particulièrement du mode de production domestique propre au patriarcat décrit par Christine Delphy, la question de cette surdétermination reste posée.

Franz B. (AL 93)

Alain Bihr, Les rapports sociaux de classes, Page Deux, 2012, 142 p., 9,50 euros

 
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