Violences : le coût des coups au travail

Le 25 novembre 2020 – journée pour l’élimination des violences faites aux femmes – marquait le début de la mobilisation intersyndicale pour l’adoption de la norme OIT contre les violences sexistes et sexuelles au travail. Présentes massivement, elles sont un fléau encore rarement puni.
Soixante pour cent des Européennes qui travaillent ont déjà été la cible de violences sexuelles dans l’exercice de leur emploi [1]. La violence machiste est « un sabotage permanent que nous expérimentons dans toute la société » [2]. Présentes massivement au travail, ces violences sont l’une des composantes invisibles de la lutte des classes.
En 2017, une syndiquée SUD Commerce révélait les violences sexistes à H&M. Première femme à les dénoncer, elle est menacée de licenciement. En 2020, elle rend public son combat. Des rassemblements de soutien devant l’enseigne se multiplient, la parole se délie chez les collègues et clientes [3]. Dans ce secteur féminisé à 78 % [4], les violences machistes sont l’un des rouages de la précarité.
78 % des travailleurs à temps partiel du privé sont des femmes [5]. Le patriarcat se nourrit du silence de la terreur. Il poursuit un double objectif : maintenir la domination des hommes, tirer profit des femmes. En moyenne, les hommes gagnent 34,6 % de plus que les femmes [6]. La plus-value féminine est à la base de la loi machiste du capitalisme. Sans la violence, la double exploitation du travail domestique et salarial des femmes, ne pourrait avoir lieu.
47 % des travailleuses sont employées dans dix professions [7], toutes à bas salaires [8]. « Les travailleuses sont les plus exploitées parmi les plus exploitées, c’est d’elles que le patronat – notre ennemi de classe – tire le plus de profits », dénonçait en 1910 l’ouvrière syndicaliste Olga Tournade. Parmi les plus exploitées, les femmes racisées sont embauchées principalement dans quatre secteurs : aide-soignante, aide-maternelle, aide à la personne, agentes d’entretien. « Les violences machistes, les violences des frontières et les violences de l’exploitation sont indissociables » [9].
« Mes collègues qui ont connu la grande précarité avant d’être aide-soignante et d’avoir un CDI, même si elles ne sont pas contentes, elles n’osent pas dire non aux chefs. Elles ont trop galéré avant, maintenant elles n’arrivent plus à se défendre. », déplore une aide-soignante syndicaliste. Les violences économiques vulnérabilisent les femmes et réduit leur capacité à dire « non ».
Concentrer les travailleuses pour mieux les soumettre
« Que toutes nos camarades femmes s’enfoncent bien dans le crâne cette règle essentielle de conduite : il faut oser, la force des hommes ce n’est pas leur intelligence, leurs connaissances supérieures […] c’est leur confiance infinie en eux-mêmes » écrivait Marie Guillot [10], une syndicaliste révolutionnaire de la CGT. Cette capacité politique est notre objectif, en créer les conditions est notre priorité. Les travailleuses ne sont pas la classe des victimes, mais la classe de celles qui doivent résister.
Vivre à l’abri des violences est un droit qui ne peut être mendié mais doit être pris. La construction de contre-pouvoirs féministes suit la logique du syndicalisme révolutionnaire : l’accroissement du mieux-être par une lutte quotidienne contre les violences machistes, combinée à l’action au service de la transformation radicale.
Louise (UCL Saint-Denis)