Cinéma : Cordier, « Frères de classe »




Certaines images deviennent des icônes politiques. C’est le cas de cette photo prise pendant la lutte du Joint français à Saint-Brieuc en 1972. Elle nous montre un ouvrier, enragé, en larmes, tenant un CRS par le col. Cette photo a été reprise, utilisée, diffusée comme un symbole de l’oppression policière sur la classe ouvrière.

Mais au-delà du mythe, quelle réalité se cache derrière cette image ? Que s’est-il passé ce jour-là, et même au-delà, entre l’ouvrier et le policier venu briser la grève ? C’est à cette question que Christophe Cordier a voulu répondre. Il est parti à la recherche des acteurs de la photo, trente ans après.

Ce serait rendre un mauvais service que de vous dévoiler le fruit de cette recherche. Il faut suivre avec lui l’ouvrier de la photo, qu’il a retrouvé, toujours en lutte, inchangé. Il faut découvrir à son rythme, les collègues de l’époque, les enfants du CRS et ses anciens collègues. Avec une grande sobriété, beaucoup de pudeur et d’émotion, Christophe Cordier dévoile la réalité des faits derrière le mythe de la photo.

Après La Délégation sur les travailleurs du nettoyage dans le rail, Une journée pour rebondir sur les grèves du printemps 2003, Christophe Cordier signe un nouveau film particulièrement réussi. Au premier abord, on peut penser que le message politique y est moins présent que dans ses précédents films. Car il s’attache davantage aux histoires personnelles, aux liens entre les personnages qu’il nous présente.

Mais c’est pour mieux revenir à cette problématique éminemment libertaire : comment s’articulent la sphère de la « vie privée » et la sphère militante ? Comment les deux entrent en interaction et parfois en conflit. Comment il ne peut pas être question de faire abstraction de son histoire personnelle dans les luttes, à moins de nier l’individualité de chacun, ce qui est une dérive bolchevique récurrente.

C’est un film politique qu’il faut voir, et qu’il faut montrer, bien après l’avant-première le 22 septembre, aux Ateliers Varans, à Paris 11e.

Laurent (AL Paris-Est)

 Christophe Cordier, Frères de classe, Yumi Productions, Les Films du Moments, Les Films d’Ici, TV10 Angers avec la participation du CNC et du Conseil général des Côtes d’Armor.

 
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