Sociologie : Les nouveaux prolétaires de Sarah Abdelnour, éd Textuel




Les nouveaux Prolétaires, publié dans la collection « Petite encyclopédie critique », a pour objectif de revenir sur la notion de prolétariat aujourd’hui. En effet, le discour dominant affirme que la classe ouvrière a depuis longtemps disparu, pour laisser place à une gigantesque classe moyenne à laquelle échappent seulement quelques exclus quasi-résiduels (banlieusards, SDF, sans papiers…). Au contraire pour Sarah Abelnour, parler de prolétariat n’a en rien perdu de son actualité même si la composition de celui-ci a évolué depuis la grande restructuration économique des années 70.

Pour commencer, elle essaye de donner une définition précise de ce qu’est le prolétariat. En effet, le terme a tellement été galvaudé au fil du temps qu’on a pu lui faire dire tout et son contraire. Pour commencer, le prolétariat ne correspond pas exactement au salariat. Le prolétaire est caractérisé par le fait de ne posseder que sa force de travail (en gros, ses bras et ses compétences). Ce n’est pas le cas de certaines couches salariées qui bénéficient de l’accès à la propriété foncière, à un série de biens de consommation marquant un statut social plus élevé, au crédit, ainsi qu’à certaines formes de capital économique et/ou culturel. Le prolétariat correspond donc aux salariés sans réserves, qui n’ont pas les moyens de bénéficier de cette série de biens.

Alors que l’ancien prolétariat était majoritairement composé d’ouvriers de l’industrie, qu’en est-il aujourd’hui ? Si les ouvriers n’ont évidemment pas disparu comme l’idéologie dominante voudrait le faire croire, leur part dans la popultion active a diminué. De six millions dans les années 70, ils sont passés à 4,7 millions en 2011 alors que la population a augmenté entre temps. Ils ont été rejoints par une cohorte d’employé-e-s du secteur des services, sous payés et exploités. De plus, le prolétariat comporte plus de femmes et d’immigré-e-s qu’auparavant.

Enfin, un autre élément carectérise le « nouveau prolétariat » : la précarisation. Si auparavant, la plupart des ouvriers avait un statut plus ou moins stable, de nos jours une part croissante du prolétariat connaît l’expérience de la précarité. On peut comprendre celle-ci comme étant une insécurité permanente par rapport à son statut économique, entraînant une vulnérabilité face aux employeurs et une difficulté à se projeter dans le futur en termes économiques. Si le prolétariat dans son ensemble n’est pas précaire, c’est néanmoins une part croissante de celui-ci qui le devient.

Pour conclure, l’ouvrage dessine les contours d’un prolétariat qui, loin de disparaitre, s’est même développé. Il comprend aussi bien des salarié-e-s du secteur industriel que de celui des services, reservoir croissant d’innombrables exploité-e-s.

Si l’ouvrage dresse un tableau très fin du prolétariat, on pourra néanmoins regretter qu’il n’articule pas assez analyse sociologique et horizon d’action, tout en offrant néanmoins un état des lieux fouillé et pertinent sur une question plus actuelle que jamais.

Matthijs (AL Montpellier)

Sarah Abdelnour, Les nouveaux prolétaires, « Petite Encyclopédie critique », Textuel, 2011

 
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