A Contre Courant : Une étincelle pourrait suffire !




Chaque mois, le mensuel Alternative libertaire reproduit l’édito de la revue alsacienne À Contre Courant, qui de son côté reproduit l’édito d’AL. Pour contacter ces camarades : ACC, BP 2123, 68060 Mulhouse Cedex.


Après de 80% des exprimés, le « Oui » espagnol illustre une fois de plus la forte domination de la bourgeoisie et la redoutable efficacité de ses moyens de propagande et d’asservissement. Certes, les conditions en Espagne sont particulières ; certes, le prolétariat s’est méfié pour finalement s’abstenir massivement. Mais s’il avait retrouvé un peu de vigueur idéologique et sa conscience de classe il aurait su combattre par un « NON » catégorique la mise en place d’un arsenal juridique violemment antisocial.

De ce côté-ci des Pyrénées, le scénario présente des aspects plus réjouissants. Elites politiques et apparatchiks syndicaux essuient revers sur revers ; ils ne cachent plus leur contrariété, voire leur angoisse pour certains, jusqu’à donner l’impression de paniquer : étranglement du débat parlementaire sur la loi Fillon, vote d’urgence au Sénat sur la Constitution, convocation précipitée du Congrès, amputation de la durée de la campagne référendaire pour tenter de faire passer à la hussarde le Traité Constitutionnel... Est-ce que, en cette mi-février, parler d’un climat de « sauve-qui-peut » dans un camp du « Oui » aux abois est faire preuve d’un optimisme exagéré ?... Peut-être ; attendons encore un peu que le mouvement social prenne davantage d’ampleur...

Mais déjà, cette claque infligée à Thibault !!! Magistrale, Non ?! Le voilà complètement déstabilisé celui qui, aux yeux d’une partie du mouvement ouvrier, et aux yeux d’une grande majorité de cégétistes restait encore le leader de Décembre 95 (c’est d’ailleurs pour cette unique image qu’il avait été nommé à ce poste). Le voilà contraint de montrer de manière très claire le camp auquel il appartenait : celui du « Oui », celui de la soumission à la CES et donc de l’intégration du syndicat aux rouages des institutions européennes. La Confédération générale du travail est allée puiser dans son histoire, dans sa base, l’exigence de sa survie comme syndicat de classe. Les 82% de rejet à la Constitution qui ont mis le bureau confédéral en déroute auraient dû immédiatement provoquer la démission de Thibault et de ses acolytes. Mais ces grands démocrates s’accrochent, ils n’ont pas dit leur dernier mot : après tout, Cohen, secrétaire général de la fédération Mines Energie CGT, battu sur les retraites en janvier 2003, est bien resté ; et c’est la base et les salariés qui ensuite ont perdu la bataille...

Pour l’instant, ni le gouvernement, ni l’opposition officielle, ni les bureaucraties syndicales ne parviennent à freiner la colère sociale qui monte. De plus, dans l’urgence, la classe politique doit engager une bataille électorale où l’enjeu est considérable. Avec des caciques de droite pour la plupart HS, il va revenir à quelques bouffons roses et verts de la « gauche durable » de défendre ouvertement les intérêts de la grande bourgeoisie internationale ; évidemment sans argument sérieux, réduits à n’user que de quelques mimiques médiatiques. On vous le disait : le scénario présente des aspects réjouissants !...

Mais n’oublions pas, camarades : si le « Non » réussit à devenir numériquement et politiquement consistant, c’est d’abord à une dynamique sociale qu’il le devra. Un « Non » qui pourrait tout à la fois être porté par les luttes et les dynamiser. Les apparatchiks syndicaux qui nous expliquent sans rire que le meilleur moyen de favoriser le « Non » est de ne pas appeler à voter « Non » (!) l’ont bien compris : secrètement pour le oui (mais se l’avouent-ils ?), ils pressentent que dans ces circonstances les luttes pourraient devenir réellement dangereuses pour le système qui les nourrit.

Une étincelle pourrait suffire. Provoquons-la !

 
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