Antipatriarcat

LGBTI et féminisme : s’organiser en contre pouvoirs




Partout en France, des contre-pouvoirs féministes et LGBTI se créent pour résister et s’émanciper de notre société patriarcale. Qu’ils luttent au travers d’associations et des syndicats, se rassemblent et se rencontrent autour d’ateliers en non-mixité, et créent une contre-culture, les contre-pouvoirs féministes et LGBTI sont une force de plus en plus puissante et présente.

Pour construire un rapport de force féministe et LGBTI, l’autogestion et l’auto-émancipation sont de mise. Le carburant de ces contre-pouvoirs sont les violences patriarcales vécues partout et tout le temps. Face à un système de domination omniprésent, notamment au sein de la famille et qui imprégne l’ensemble de la société, les luttes collectives antipatriarcales ont une vocation révolutionnaire et ont un véritable impact sur les conditions de vie des femmes et des personnes LGBTI.

Ces contre-pouvoirs s’organisent en associations, collectifs, etc. Le principe de base est le même : «  Ne me libère pas, je m’en charge  ». L’auto-émancipation est le moteur de ces luttes, qui ont permis des acquis sociaux. On peut citer, pour les plus récents, le droit à l’avortement, pour lequel la lutte continue, la fin de la stérilisation forcée des personnes trans lors du changement d’état civil, le mariage pour tous.

Les mouvements féministes et LGBTI sont partout. L’engagement féministe dans les luttes sociales est aussi vieux que les luttes sociales elle-même. Elles sont sur tous les fronts  : contre les violences faites aux femmes, contre les discriminations sexistes et LGBTIphobes, et aussi contre la réforme des retraites, dans les syndicats, contre les lois répressives et liberticides, contre les lois racistes et pour les sans-papiers.

Sur tous les fronts

Récemment, par exemple, le collectif Marseille féministe a soutenu la grève des femmes de chambres en lutte du Novotel Marseille Prado, sur le terrain, mais aussi en organisant des soirées de soutien pour remplir les caisses de grève. Cette grève s’est organisée notamment face à la répression syndicale et le non-paiement des heures supplémentaires.

Dans chaque ville, des collectifs féministes participent et mobilisent, en lien avec des collectifs, syndicats et organisations politiques, autour de thématiques variées comme la grève féministe du 8 mars ou la mobilisation Toutes aux frontières. Ce réseau européen, qui promeut la solidarité féministe avec les femmes et les personnes trans migrantes, souhaite «  Lutter ensemble contre les politiques européennes de la criminalisation de la migration  ». Ce réseau est né en 2019 à Genève, autour d’une rencontre européenne de militantes féministes sur le thème «  Femmes-Migrations-Refuge  ».

L’expression de ces contre-pouvoirs passe par une visibilisation des luttes, des actions éducatives, la mise en place d’outils et l’entraide. L’éducation se fait d’abord entre personnes concernées, en non-mixité, telles les permanences pour les personnes trans menées par les associations, ou des collectifs féministes apprenant l’auto-examen gynécologique.

L’éducation féministe à la santé sexuelle est aussi un axe important, menée notamment par le Planning familial, mouvement d’éducation populaire, qui milite pour le droit à l’éducation à la sexualité, à la contraception, à l’avortement et à la dignité dans le soin. Il y a aussi des associations de personnes trans, comme Transat, qui vont former des soignantes, des médecins, dans l’accompagnement et la prise en charge d’une transition médicalisée, l’accès aux droits liés au statut d’affection de longue durée (ALD), etc.

Se rassembler

Une autre forme de mobilisation passe par l’occupation de l’espace public, comme le travail des colleuses. Vous reconnaîtrez sûrement ces feuilles A4 assemblées dans des messages de soutien aux femmes, les chiffres des féminicides, la dénonciation du patriarcat. C’est un travail essentiel de visibilité dans l’espace public, de la réalité des femmes et des personnes LGBTI dans une société patriarcale.

Le groupe local lyonnais de l’Union communiste libertaire a participé à la sensibilisation aux luttes féministes et LGBTI en organisant le festival antipatriarcal. Pendant un mois, des collectifs se sont retrouvés pour discuter patriarcat et féminisme, par le biais de films, ateliers ou débats. Ce même groupe avait initié des Kaféministes, des rencontres, ateliers, discussions ou même goûters, ouverts à toutes et tous, pour débattre, apprendre et s’entendre.

Rendre visible

De manière moins visible s’organise l’entraide. Face aux difficultés matérielles, l’entraide devient primordiale. C’est un logement d’urgence pour une personne LGBTI chassée de sa famille, des cagnottes pour financer une opération, des listes de gynécologues féministes, ou des actions en non-mixité. Par exemple, l’association Acceptess-T a lancé à Paris des journées piscine, réservées aux personnes trans. Cette activité en non-mixité permet d’accéder à des loisirs difficilement envisageables pour les personnes trans, dont les corps sont rejetés par notre société patriarcale.

L’entraide c’est aussi les groupes de paroles pour femmes, l’aide aux démarches administratives de changement de prénom et d’état civil pour les personnes trans, le soutien juridique, tout ce qui permet de se construire, de prendre en force pour exister dans la société.

Passer par la non-mixité est souvent une étape cruciale. La non-mixité permet l’auto-organisation. C’est souvent un lieu de politisation fort  : la loi du silence fait rage dans le monde patriarcal, alors mettre en commun les récits de vies permet de les politiser et mettre en exergue des violences systémiques.

Les luttes féministes et LGBTI contribuent à l’apparition d’une contre-culture. Lutter contre le patriarcat est aussi donner d’autres représentations, d’autres discours, d’autres récits. En questionnant les représentations patriarcales, les stéréotypes, les discours sexistes, homophobes, transphobes ou encore la culture du viol, une contre-culture féministe permet de créer un nouvel imaginaire collectif.

Contre-culture

Ainsi, de nombreux podcasts, BD, livres, films, ou même musiques féministes existent  : Ouvrir la voix d’Amandine Gay, Un podcast à soi, qui aborde les questions de genre et de féminismes, Libres  ! Manifeste pour s’affranchir des diktats sexuels, d’Ovidie et Diglee qui a été adapté en série animée, ou encore L’origine du monde de Liv Strömquist, sur la répression sexuelle.

S’émanciper des diktats patriarcaux, c’est défaire l’image qu’impose la société, c’est surpasser la place assignée et faire entendre la pluralité des voix. Créer une contre-culture, c’est aussi prendre une place qui n’est pas à prendre, imposer les voix et les histoires dans une société qui n’en veut pas, pour parler autrement de notre société.

Avec humour, douceur ou abruptement, ces productions culturelles viennent enrichir un imaginaire collectif féministe, questionner notre société patriarcale, visibiliser son oppression et les alternatives possibles, partager les savoirs, les théories, les idées et aussi les victoires.

Louison (UCL Marseille)

 
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