Femmes-hommes : militer sans crainte




L’UCL veut être une organisation accueillante pour les femmes, et fermée aux hommes violents.

L’UCL dispose d’une procédure en cas d’accusation de violences sexuelles contre un de ses membres. C’est une chose qui peut arriver dans tout milieu (professionnel, sportif, associatif...) et le milieu révolutionnaire n’en est pas exempt.

Quand cela arrive, si aucune procédure n’a été prévue pour y faire face, cela peut avoir des conséquences détestables : omerta, psychodrame stérile, départ de l’agressée et maintien de l’agresseur…

Le congrès fondateur de l’UCL (Allier, juin 2019) a donc décidé la chose suivante : s’il advient qu’un ou des membres de l’UCL sont accusés d’agression sexuelle, le secrétariat fédéral doit être saisi de la question et mettre en place une procédure. Sous le contrôle d’une coordination fédérale, cette procédure doit respecter les principes suivants :

  1. le ou les militants accusés sont suspendus de l’organisation pendant la durée de l’enquête ;
  2. la victime (ce qui n’est pas un état permanent mais une situation à un moment donné) est écoutée, soutenue, entourée, encouragée (pas plus) à porter plainte ;
  3. une commission d’audition non mixte, indépendante des parties concernées, est formée au sein de l’UCL pour auditionner les uns et les autres ;
  4. sur rapport de cette commission d’audition, une coordination fédérale statue sur les suites à donner à la suspension des militants accusés : exclusion, réintégration, ou réintégration après probation (Articles 2.5.2 et 2.5.3 des statuts).

Brèves consignes
(valables pour toute organisation)
pour guider l’accueil et l’écoute
des femmes victimes de violences

Recommandations établies par le Collectif féministe contre le viol.

Ce qu’il faudrait éviter

  • Mettre en doute la réalité des faits de violence que relate la victime. La confiance accordée et ressentie est une condition préalable indispensable pour que la personne reçue s’exprime pleinement et que certaines confusions se dissipent dans le cours de l’entretien.
  • Considérer la personne violentée comme une « victime-à-vie », c’est-à-dire comme une personne incapable de s’en sortir, dépourvue de ressources psychologiques personnelles.
  • Refuser l’entretien en réorientant vers une structure avant d’avoir pris le temps d’écouter, d’entendre et de manifester compréhension et solidarité.
  • Ne pas accorder la même importance aux violences subies dans un passé lointain et aux
    agressions récentes.
  • Exprimer une pitié compatissante du genre : « Ma pauvre amie, c’est terrible ! » ; « C’est honteux » ; « Comment de telles choses peuvent- elles arriver ? »
  • Exprimer un jugement moral. Il faut éviter et, en règle générale, bannir tout terme relevant de la morale notamment condamnant l’auteur des violences : « Cet homme est un bourreau », « Votre mari est un grand pervers ».
  • Au contraire il faut utiliser des termes de droit, nommer et désigner les faits par la qualification que leur attribue le code pénal.
  • Énoncer un jugement condamnant l’agresseur mais il importe de condamner ce qu’il a fait, c’est-à-dire les actes, agissements qui ont porté atteinte à la femme violentée.
  • Terminer l’entretien abruptement : il faut au contraire préparer et annoncer la fin du temps partagé.
  • Omettre de prévoir une suite à ce moment de partage, l’attention portée par autrui aux perspectives est un élément particulièrement réparateur pour la victime.

Ce qu’il faudrait faire

  • Exposer brièvement la fonction et les objectifs de l’instance qui accueille.
  • Poser les limites et les conditions de l’entretien et de l’intervention.
  • Veiller à ce que la personne reçue soit, et se sente, en sécurité pendant l’entretien.
  • Poser le repère de la loi : il s’agit d’une infraction, délit ou crime, une plainte a t-elle été déposée ? Qu’envisage-t-elle à ce propos ?
  • Ecouter avec considération et respect accepter et croire ce que dit la personne (ce n’est pas toujours facile) prendre en compte son évaluation des faits et ne pas réajuster à ses propres normes, par exemple considérer comme mineures certaines formes d’agression sexuelle (exhibitionnisme,
    masturbation, pornographie...).
  • Demander à la personne accueillie de définir et formuler ses priorités dans sa demande d’aide.
  • Renseigner sur les lieux de prise en charge : psychologique, sociale, judiciaire, médicale, ceci de façon circonstanciée qui favorise la possibilité d’y recourir. Il ne suffit pas de distribuer l’information elle est rarement assimilable telle quelle. Il importe d’engager un échange sur
    l’opportunité de telle démarche, sur son intérêt, sur le moment où elle peut devenir réalisable.
  • Informer des procédures et recours possibles en prenant garde à ne pas évincer le risque toujours présent d’une suite judiciaire qui ne réponde pas aux aspirations de la victime. Replacer le travail ’enquête policière et judiciaire dans le cadre général de la loi en expliquant les processus d’instruction et d’enquête à charge et à décharge.
  • Rassurer, sans minimiser ni banaliser.
  • Nommer explicitement les formes de violence exercées, énoncer leur incrimination, traduire en langage judiciaire : c’est ce que la loi appelle séquestration, viol... : une victime a des droits, elle
    peut les faire valoir en portant plainte. Qu’a-telle décidé à ce propos ?
  • En cas d’absence de recours à la justice : analyser les raisons pour lesquelles cette décision est prise, actuellement, inviter à la réflexion.
  • Dans les situations de violence conjugale aider à repérer le cycle de la violence.
  • Respecter les scénarios et plans de protection utilisés par la personne agressée.
  • Rendre à l’agresseur la responsabilité de ses actes : une victime n’est pas responsable de la violence exercée à son encontre. Démonter son mode opératoire et sa stratégie.
  • Terminer l’entretien sur des perspectives positives, ou du moins actives, et ne pas se quitter avant que la personne reçue envisage l’avenir (même très proche) et non plus seulement les faits de violence subis.
Manifestation féministe en Galice (Espagne) en mars 2019.
cc Galiza Contrainfo

Eléments spécifiques
de la stratégie
des auteurs de violences sexistes

Une analyse du Collectif féministe contre le viol.

Quels que soient la forme de violence exercée et le statut de l’agresseur (proche, inconnu), on retrouve des caractéristiques semblables dans la stratégie mise en place par l’auteur de violence :

1. Choisir, sélectionner, voire séduire la personne dont il fera sa victime (une grande blonde, une femme seule, une vieille femme, une femme handicapée...).

2. Cibler la victime potentielle, dans une période particulière.

  • Choisir une fragilité temporaire ou durable : celle qui deviendra sa victime doit être repérée vulnérable à un moment précis (sans amis, exposée, sans moyens, en deuil, dépendante, malade, etc.).

3. Isoler la victime

  • Géographiquement, socialement, affectivement, familialement, professionnellement...

4. Instaurer un climat de peur et d’insécurité :

  • se présenter comme tout-puissant, en capacité de revenir à tout moment,
  • user de menaces et en mettre quelques-unes en œuvre,
  • formuler des représailles sur les proches.

5. La dévaloriser, la traiter comme un objet :

  • humilier, dénigrer, critiquer, moquer, insulter, affaiblir, avec la double conséquence qu’elle ne répliquera plus, qu’elle perdra l’estime d’elle-même.

6. Inverser la culpabilité :

  • transférer la responsabilité de la violence à la victime,
  • ne se reconnaître aucune responsabilité dans le passage à la violence – elle a provoqué, elle souhaitait que je fasse ça, elle m’a énervé, entretenir la confusion ; attitudes contrastées, périodes d’accalmie alternées de
    violences.

7. Agir en mettant en place les moyens d’assurer son impunité :

  • recruter des alliés,
  • organiser une coalition contre les faibles,
  • prévoir d’impliquer la victime dans le déroulement des faits,
  • lui offrir quelque chose, lui demander de l’aide, créer un besoin...
    = « Verrouiller le secret »

Les décisions relatives à l’intervention sont facilitées lorsque l’analyse des faits met en évidence que plusieurs ou toutes ces caractéristiques sont présentes dans une situation : il s’agit bien de violence, c’est-à-dire d’actes volontaires qui portent atteinte à la personne. L’intervention qui suivra ne peut que se fonder sur la loi qui protège les victimes et sanctionne les auteurs.


Contrecarrer,
contrebalancer,
déjouer la stratégie de l’agresseur

Analyse établie par le Collectif féministe contre le viol.

Finalement, ce qui va guider notre intervention pour venir en aide aux victimes c’est tout simplement faire l’inverse de ce qu’a cherché à accomplir l’agresseur.

1. Il a ciblé un moment particulier de sa vie, elle croit que c’est lié à ce qu’elle est : je mets en lumière des circonstances auxquelles elle ne pouvait rien ou qui ne sont pas dangereuses sans l’action d’un agresseur.

2. Il veut l’isoler : je me signale, je manifeste mon intérêt pour elle, je me montre disponible à sa parole, je ne laisse pas le silence entre nous, je l’aide à repérer autour d’elle qui peut l’aider, la soutenir.

3. Il l’a humiliée, la traite comme un objet : je la valorise, je félicite ses actions, elle est courageuse, elle cherche une solution, elle envisage des possibilités. Je salue ses capacités : avec les enfants, dans son emploi, vis-à-vis de sa famille, dans son parcours, etc., je l’invite à décider et je valide ses choix.

4. Il la rend responsable de la situation : je m’appuie sur le droit, sur la loi pénale pour attribuer à l’auteur de violence la pleine et totale responsabilité de ses actes.

5. Il fait régner la terreur : je me préoccupe d’améliorer sa sécurité tout en lui démontrant la dangerosité de son agresseur, je résiste moi-même à l’emprise de la peur et pour cela je fonde mon raisonnement et mes déclarations sur la loi qui sanctionne et réprime de tels agissements.

6. Il veut assurer son impunité en recrutant des alliés : je suis sur mes gardes pour ne pas, à mon corps défendant, être parmi ses alliés. C’est peut-être là le plus difficile car l’ensemble de notre système de référence est du côté des agresseurs, du côté des forts, du côté des puissants. Il faut résister à nos réflexes ancestraux : déni de la gravité des faits, recours au fatalisme, paresse à affronter les personnes dominatrices et choix relevant davantage de la médiation, de l’accommodement, de la réciprocité.

Quand il y a violence, ce n’est plus le temps de la négociation mais le temps de la loi qui donne à chacun sa place et son statut : il y a une victime, il y a un agresseur. L’accueil et l’écoute des femmes victimes doivent être orientés pour soutenir leur déposition en justice en relatant les faits de façon circonstanciée et approfondie. Elles ont besoin de tous nos encouragements pour y parvenir.

 
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