Antipatriarcat : Avant qu’elle ne hurle « non ! »




Les propos entendus et lus autour de l’accusation de viol portée contre Dominique Strauss-Kahn témoignent de l’incroyable tolérance sociale envers le viol et de la morgue des bourgeois, politiques et journalistes.

La phrase de Jean-François Kahn parlant de « troussage de domestique » restera dans nos mémoires comme le prototype du mépris porté aux femmes travailleuses et aucune excuse n’effacera cette première réaction spontanée. Les protestations d’amitié et d’incrédulité d’autres hommes (très majoritairement) qui se croient l’élite affirment encore plus cette connivence des nantis, cette conscience absolue de classe ayant le droit d’utiliser l’autre classe pour son bon plaisir.

La tolérance sociale envers le viol, c’est l’analyse mi-rigolarde, mi-incrédule des faits dénoncés qui nous la dit. Dans un monde qui respecte les femmes, le scandale premier aurait été qu’une femme ait peut-être été agressée, pas qu’un peut-être agresseur soirtmenotté. Les plaisanteries grivoises pleuvent pendant qu’on parle de sexe où il n’y a que violence, de puritanisme où il y a attention portée aux agressions. Le viol n’est pas un scandale dans notre société, accuser un homme en vue en est un.

Le patriarcat, c’est ce système qui fait que les fillettes apprennent à brimer leurs corps (cours pas, tu vas tomber ; arrête, tu vas salir ta robe), à être jolies avant que d’être confortables et n’apprennent pas à se battre quand les garçons eux, y sont encouragés. Le patriarcat c’est ce système où les femmes sont heureuses de porter des jupes et des talons hauts qui leur font une « jolie » silouhette en remplaçant le plaisir de marcher et bouger par celui de séduire les hommes. Le patriarcat c’est ce système qui inculque qu’une femme doit être flattée d’être sifflée ou abordée. Le patriarcat c’est ce système où les femmes n’apprennent pas à dire non, à s’insurger et à crier, où il ne faut pas faire de scandale et où on inculque aux hommes que le consentement c’est tout ce qui est avant qu’elle hurle « non ». Le patriarcat c’est ce système qui assène, dans ses films, ses livres, ses conversations que les femmes aiment être un peu « forcées ». Le patriarcat c’est ce système qui enquête sur la moralité des victimes d’agression sexuelle.

On peut légitimement se demander comment un homme peut imposer une fellation, alors qu’elle met ses testicules à portée de la main qui peut serrer et son sexe à portée des dents qui le peuvent aussi ? Quelle aliénation du corps et du consentement faut-il pour en arriver là ? Quelle habitude de soumission ? Quelle peur de quelles violences ? Quel poids social de l’humour qui fait rire de l’inacceptable ?

Le combat à mener là est celui d’une éducation qui apprenne aux filles à connaître leur propre désir (et pas à être flattées de celui des hommes), à savoir l’exprimer et le faire respecter, une éducation qui leur apprenne qu’elles peuvent et qu’elles ont le droit de se défendre, qu’elles peuvent être fortes et puissantes.

Christine (AL Orne)

 
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