Perrine Ablain (Syndicat des libraires d’Île-de-France) : « Défendre notre vision du métier »




Dans le commerce, il existe un Syndicat de la librairie française (SLF), qui représente très bien les intérêts des libraires... patrons. Mais voici que se crée un Syndicat des libraires ­d’Île-de-France (SLI), affilié à la CGT, qui ­s’adresse aux employées. Perrine Ablain, libraire au Genre urbain (Paris 20e), est une de ses ­fondatrices.

Comment est né le SLI ?

Tout est parti d’un cas précis : une libraire parisienne, confrontée à du harcèlement, a demandé de l’aide au SLF, sans aucun succès. Elle a cherché ailleurs... Et c’est la CGT-Commerce qui a répondu à l’appel, puis qui a accompagné la création du SLI. Les librairies indépendantes sont souvent des petites structures (en général moins de 11 employées), ce qui complique les rapports entre direction et salariées, mais aussi les liens entre nous ! Or on s’aperçoit vite, en discutant entre collègues, qu’on rencontre les mêmes problèmes : salaires bas, législation mal respectée (le paiement des heures sup’ n’est pas toujours assuré par exemple), harcèlement parfois.

Quel est la stratégie en vue ?

D’abord, se faire connaître ! Et informer sur la convention collective, sur nos droits, qui sont très souvent mal connus des employées (et même des patrons !). Il faut décloisonner les librairies, créer des liens entre nous. Pour commencer, on va se cantonner à l’Île-de-France. Notre deuxième objectif, c’est de dénoncer nos salaires, très bas rapportés au niveau d’études et à la charge de travail. C’est un problème récurrent dans le ­monde de la culture : on est censées être passionnées... et donc donner beaucoup en échange de peu. Nous voulons aussi lutter très fermement contre les situations malsaines permises par le face-à-face entre une ou un chef autoritaire qui se sent tout-puissant et une petite équipe effrayée à l’idée de « se griller » si elle se défend. Ces situations sont hélas vraiment courantes. Enfin, le SLI défend une autre vision du métier, mis à mal par la surproduction éditoriale. Être libraire, c’est prendre le temps de lire, aller chercher les trésors des catalogues... pas simplement ranger les dernières nouveautés sur des étagères.

Et alors, comment on fait tout ça ?

Pour rassembler les libraires, on a créé une page Facebook et une liste mail. Le SLI a aussi l’intention d’organiser régulièrement des réunions publiques – nous avons fait plusieurs adhésions dès la première, fin mars. Et en ce moment, on travaille beaucoup sur les négociations des accords de branche ; c’est un très gros enjeu pour toutes et tous les salariées, qui se joue en commission paritaire. Or pour le moment, la CGT n’a que 4 sièges, et les autres syndicats présents (CFTC, CFDT, UNSA, FO, CFE-CGC) ne se font pas représenter par des libraires. Ça ne facilite pas les négociations ! A long terme, on espère peser davantage dans les élections professionnelles, pour lancer une dynamique vraiment favorable aux salariées des librairies.

Propos recueillis par Mélanie (UCL Paris-Sud)

  • SLI : syndicatdeslibrairesidf@gmail.com
 
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