Syndicalisme

CGT : parler politique, oui, mais pas politicien




Quel rapport de la CGT au politique et aux partis ? À l’approche du congrès confédéral du printemps 2022, le débat a été relancé par la signature d’un pacte d’action avec des assos ­écologistes, et par les habituels positionnements internes en vue de la présidentielle.

La rédaction sans cesse changeante du préambule des statuts de la CGT marque parfaitement l’évolution des conceptions majoritaires du rapport au politique. La Charte d’Amiens fixait à la CGT sa « double besogne » : revendications immédiates et avènement du socialisme, en mettant à distance les organisations politiques ; la grève générale étant l’outil pour l’expropriation des capitalistes et la relance des usines.

Mais la CGT s’est progressivement recentrée sur le revendicatif en déléguant le changement de société aux partis. La recherche d’une « issue politique » électorale aux luttes sociales aboutira à la décision de limiter strictement la grève générale de Mai 68 aux revendications économiques et, quelques années plus tard, à cosigner le Programme commun de gouvernement conclu entre le PCF, le PS et le MRG.

« Plus jamais ça »

Réunissant entre autres la CGT, Solidaires, la FSU, la Confédération paysanne, Attac, le Dal, mais aussi les ONG Greenpeace et Oxfam, ce pacte  [1] appelle à un « plan de sortie de crise » pour l’urgence sociale, climatique et sanitaire en cette période de pandémie. Encore largement inconnu dans la CGT, le pacte est victime de polémiques contradictoires dans la confédération.

Signé en urgence par Martinez, sans doute pour ne pas laisser le monopole à la CFDT qui commençait à fédérer autour de son propre appel, il n’a été discuté nulle part, ni au bureau confédéral, ni dans le groupe de travail Environnement. Ce passage en force laisse un malaise durable, y compris chez celles et ceux qui soutiennent la démarche et qui ont créé des déclinaisons unitaires locales.

Mais pour toutes celles et ceux qui s’y opposent sur le fond, le déni démocratique sert de prétexte. Un premier pilier de la contestation est forgé par ceux qui considèrent que la CGT, déjà en difficulté dans ses bases, ferait mieux de se concentrer sur les luttes traditionnelles et ne pas se mêler « de politique ». Un second pilier est porté par celles et ceux qui refusent d’entendre que l’urgence écologique est devenue centrale pour une société débarrassée du capitalisme, et que les vieux réflexes productivistes doivent être revus.

Dans une CGT qui a parfois du mal à se fixer une boussole, les conflits de personne et d’orientation se déroulent le plus souvent entre militants de la mouvance du PCF. Nombre d’entre elles et eux rêvent d’un retour à un supposé âge d’or, quand l’osmose était totale entre CGT et PCF. Le lancement en grand du réseau Unité CGT rassemble une partie de ces nostalgiques. Une posture combative, un discours lutte de classe qui pourraient séduire.

Mais qui souhaite vraiment un tel retour en arrière ? Le lancement d’un appel de 500 militantes et militant syndicaux pour une candidature PCF aux présidentielles 2022 doit alerter les syndiqués. Loin des illusions ­électoralistes, c’est bien d’un retour à la « double besogne » dont les travailleuses et les travailleurs ont besoin. En toute indépendance.

Jean-Yves (UCL Limousin)

 
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