Politique

Université : Fichage et sanctions, l’arbre qui cache la forêt




En réaction à une tentative de blocage des partiels le 7 janvier, la direction de l’Université d’Évry Val d’Essonne a décidé d’exclure au moins 15 étudiantes et étudiants, avant de revenir sur sa décision sous la pression des syndicats. Un succès qui ne doit pas cacher les dérives de certaines administrations.

Le 7 janvier, un petit groupe d’étudiantes et étudiants de l’Université d’Évry, dont des syndicalistes de l’Unef, a tenté de mobiliser leurs collègues pour boycotter les partiels de fin de semestre, sans succès. La cause de leur action  : la solidarité face au mouvement social en cours, mais aussi le manque d’aménagements mis en place par l’établissement face aux difficultés des étudiants à participer aux partiels en période de mouvement social. Des étudiantes et étudiants habitant loin de l’université – déjà difficile d’accès en temps normal – ont ainsi témoigné devoir se lever au milieu de la nuit pour rejoindre leurs examens, ou à dépenser des sommes aberrantes en frais d’hôtel pour accéder à la fac. D’après plusieurs des personnes mobilisées, des étudiantes et étudiants mécontents de la situation se seraient vues conseiller d’apporter des sacs de couchage et de camper sur place. Alors que les universités parisiennes envisagent de changer les conditions d’examen, voire de les annuler, les revendications d’étudiants en difficulté méritaient au moins d’être écoutées.

En lieu de quoi, les activistes ayant participé à l’action ont reçu le lendemain une série de mails les informant de la décision de la présidence de
l’université de leur interdire l’entrée sur le site pendant trente jours, dans l’attente d’une possible commission disciplinaire. Une sanction particulièrement rude, conduisant possiblement à ce que l’ensemble des activistes concernés soient déclarés défaillants à leurs examens, et contraints de rembourser leurs bourses, conditionnées à leur assiduité en cours. Une sanction rendue possible, d’après les militantes et militants, par le fait que certains employées de l’université ont décidé de les filmer et de les photographier contre leur gré, et de les identifier par la suite grâce aux trombinoscopes de l’université, les activistes se voyant rétorquer «  nous connaissons mieux le droit que vous, portez plainte contre nous si vous n’êtes pas contents  » quand ils et elles ont critiqué ce dispositif.

Combattre de tels pratiques

Les activistes ont rapidement réussi à entrer en contact avec d’autres organisations, trouvant des soutiens notamment auprès de l’Unef, de la CGT et de Sud-Solidaires, et le jour même un rassemblement a lieu sous les fenêtres de la présidence, devant le bâtiment Maupertuis de l’université, les syndicalistes promettant de revenir en nombre si la présidence ne se reprend pas. Une heure plus tard, Jaurès Kounaté, président de l’Unef d’Évry, annonce à la sortie de sa réunion avec la présidence que les sanctions sont levées, et que la présidence ne donnera pas suite.

Cependant cette victoire cache une réalité qui doit alarmer  : dans combien d’universités des personnels administratifs se sentent-ils le droit ou le devoir de mener un tel travail de renseignement sur les étudiantes et étudiants mobilisés, voire leurs propres collègues  ? Qui leur a transmis l’idée qu’il était possible d’agir de la sorte  ? Alors que les réactionnaires s’obsèdent encore et toujours plus sur ce qu’il se passe dans l’enseignement supérieur, et qu’une autre université, celle de Toulouse, est frappée par une véritable affaire de fichage politique généralisé, il est urgent de parler de telles pratiques, d’identifier leur généralisation, et de les combattre systématiquement.

Pandov Strochnis

 
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