Acharnement contre les Roms : La Seine-Saint-Denis aux avant postes




La destruction de campements et l’expulsion de Roms ont dans le 93 précédé les déclarations de Sarkozy. À St-Denis, le campement du Hanul où résidaient plusieurs dizaines de familles a été détruit début juillet. Des soutiens ont été par la suite interpellés.

Le nettoyage au karcher continue dans un des départements les plus populaires de France. L’arrivée de Christian Lambert à la tête de la préfecture révèle la façon dont l’État perçoit ce territoire : les « qualités » principales du Préfet sont en effet d’avoir dirigé le Raid et les CRS, et d’être un homme de confiance du président. À Saint-Denis, après la campagne politique sur « l’insécurité et la drogue » permettant de justifier déploiement policier et vidéoflicage, c’est au tour des bidonvilles, des campements de fortune d’être l’objet de l’attention des « pouvoirs publics ». Les destructions s’enchaînent, sans évidemment la moindre proposition ou solution de logement.
À une politique anti-sociale est venu s’ajouter en paravent une justification populiste et nauséabonde, visant, ici, des Roms principalement originaires de Roumanie. Alors que ces situations sont liées aux conséquences du capitalisme et des nationalismes, on cherche à faire un distinguo entre habitantes et habitants sur des bases fleurant bon le racisme.

Le Hanul

Le « quartier du Hanul » se situe à l’endroit d’un ancien espace d’accès au chantier de construction du Stade de France, qui est resté non utilisé par la suite. Des dizaines de familles y vivent depuis près de dix ans. Cette occupation avait été formalisée en 2003 par une convention d’occupation signée avec la ville. Ce campement disposait de l’eau courante, du ramassage des déchets. Les enfants, dont une grande part est née à Saint-Denis, ont pu être scolarisé-e-s dans les écoles de la ville. Ces dionysiennes et dionysiens ont connus différentes descentes de polices ces dernières années, parfois particulièrement violentes.

À partir du 2 juillet 2010 la police est passée à plusieurs reprises pour signifier l’ordre de quitter les lieux. Le 6 juillet au matin, c’est un déploiement massif de « forces de l’ordre » protégeant des bulldozers qui mettent l’ensemble des habitants et des habitantes à la rue et les empêchent de récupérer une partie de leurs affaires. Nous avons appris après coup que l’expulsion est le résultat d’une demande de Plaine Commune (la communauté d’agglomération) dirigée par Patrick Braouezec, ancien maire de St-Denis. La mairie (PC) contactée dans la foulée n’a pas souhaité à ce moment-là proposer de solution d’hébergement d’urgence.

Tentatives d’intimidation et double jeu de la mairie

Le 8 juillet, un campement symbolique de quelques tentes s’installe sur la place de la mairie pour imposer une solution. Pas de réponse de la municipalité, mais un déploiement policier massif (plus d’une centaine de flics). Et qui intervient sur demande de la municipalité ! Les Roms présents réussissent à s’échapper avant que la nasse ne se referme dans la soirée. La flicaille se venge sur les soutiens (La voix des Roms, Solidaires, MRAP, associations locales, NPA, PC et AL) en procédant à plus d’une vingtaine d’arrestations. À côté, les tentes déployées sont démontées, piétinées et « saisies ».
La volonté policière d’arrêter une partie importante des soutiens n’est pas un hasard : il s’agissait de faire peur au maximum, de faire payer la solidarité concrète qui s’est mise en place et qui empêche le pouvoir d’agir en douce. C’est ainsi que les interpellé-e-s sont conduits vers le commissariat de Bobigny après un long trajet en panier à salade. Elles et ils seront relâchés dans la nuit. Plus grave : au moment du départ de Saint-Denis les flics s’arrêtent et tabassent l’un des soutiens, Ludovic, qui prenait les arrestations en photos. Jeté inanimé dans le car, il finit par être pris en charge par les pompiers sous la pression des autres soutiens embarqués. Au final seul Ludovic est mis en garde-à-vue et inculpé « d’entrave à l’action des forces de police » (sic !). Il passe en procès début septembre. Où l’on voit une fois de plus comment la violence policière se camoufle dans l’appareil judiciaire [1].

Devant la pression locale suite aux arrestations, le maire, Didier Paillard, a cessé de faire l’autruche face à la situation des habitantes et habitants du Hanul. Un nouveau terrain a été cédé par la mairie début août, pour une durée d’un an maximum  [2]. Problème, il n’est prévu que pour 120 à 130 personnes alors que 170 sont à la rue. Et la mairie cherche à tirer à la baisse le nombre de places. La lutte est donc loin d’être finie pour les anciens et anciennes du Hanul et pour les soutiens. Et il ne s’agit que d’un des nombreux campements du 93…

Simon Laviec (AL Saint-Denis)

[1Des images de la destruction du Hanul, de l’intervention policière sur la place de la mairie ainsi que le point de vue des interpellé-e-s en web-vidéo sur http://alternativelibertaire.org/

[2Pour voir les positions de la mairie sur la question des campements et des Roms, voir les communiqués du 2 et du 17 août sur http://www.ville-saint-denis.fr/

 
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