Éducation populaire : Dégraisser ? Désosser !




Plusieurs millions de personnes, pour beaucoup des jeunes, sont concernées par l’éducation populaire. Mais aujourd’hui, les associations sont menacées par le désengagement de l’État.

Pour 2008, 25 % du financement des associations liées à l’Éducation nationale (EN) a été supprimé sans délai, les dépenses ayant déjà été engagées. De plus, les mises à disposition d’enseignants pour faire vivre ces associations seront supprimées à la rentrée 2009, ce qui équivaut à une aide de 70 % de leur financement. Et on prépare l’avenir en coupant progressivement les subventions à l’INSEP, lieu de recherche de l’éducation populaire [1], ou au CIDJ [2].

L’EN vidée de ses missions

L’objectif est bien de ne plus conserver à l’EN que les enseignants, après avoir fait passer le personnel technique aux collectivités territoriales et renvoyé la santé à la médecine de ville, faute paraît-il de médecins ou d’infirmières scolaires. L’étape suivante est la disparition des Rased [3]. Pour pallier à cette disparition, se met en place la « réussite éducative », opération vantée par les députés UMP, qui vise la prise en charge des enfants en difficulté par les services sociaux. On continue également de « dégraisser le mammouth » en créant un service public de l’orientation à l’extérieur de l’EN, et en rassemblant des CIO [4], les points informations jeunesse et les missions locales, qui ont au passage perdu les subventions européennes pour 2009. À côté des élèves sélectionné-e-s au mérite, les autres seront fortement incité-e-s par ce nouveau service à aller vers les métiers « en tension ». Et après la formation initiale, c’est la formation continue qui est touchée avec la disparition des Greta et Afpa [5]. On assiste bien à une restructuration globale, en cohérence avec la Révision générale des politiques publiques (RGPP) selon les choix politiques de l’UMP, comme en témoigne la disparition de la mission statistique de l’EN et de la mission droit ville justice.

Les associations en danger

Ce sont aussi les associations de quartiers qui sont touchées. Leurs moyens se réduisent et se précarisent avec la remise en cause des conventions pluriannuelles. La réduction des postes adultes relais en 2008 a déjà entraîné des dépôts de bilans, et la perte des subventions pour le soutien scolaire les fragilisent également. À chacune dorénavant de postuler aux appels d’offres pour les activités périscolaires désormais en place au sein de l’école. Pour finir, le plan banlieue de Fadela Amara, qui remplacera la politique de la ville en 2010, ne prévoit d’aider que certains quartiers. À Paris, seuls trois quartiers, marqués par des morts dans des affrontements de jeunes, ont été retenus.

L’exemple de l’ASCé [6] est emblématique de la déstructuration du tissu associatif et par là des engagements citoyens dans la cité. L’État créé à la place un office aux moyens réduits, donc l’action se bornera aux étrangères et étrangers non européens et arrivés récemment. Les personnes vivant en France depuis longtemps seront exclues des cours de langues, alors que la maîtrise de la langue est une condition pour être régularisé-e. Des associations comme le Mrap, la LDH vont de fait perdre une part importante de leurs budgets.

Au profit du secteur privé

Ces changements orientent les activités de formation et de traitement du chômage vers le privé. C’est le cas pour le contrat d’autonomie pour les jeunes : le rôle actuel des missions locales sera joué par des associations d’insertion au personnel précarisé et en contrats CDD. Avec le recours de plus en plus fréquent aux appels d’offres, les associations craignent la fin d’une logique de subvention, et d’être alors réduites au statut de prestataires de service. D’autant plus qu’il est prévu de doter certaines associations d’éducation populaire du statut d’établissements publics. Car le but est bien là, ce statut permet l’introduction progressive mais croissante du secteur marchand sur des terrains d’activité où il pourra être seul à terme. N’y aurait-il plus du tout besoin de services sociaux ni des associations populaires issues des luttes ouvrières ? Non, car la disparition de l’éducation populaire et le désossage de l’EN n’ont qu’un seul et même but, permettre à l’économie capitaliste de faire des profits dans un secteur traditionnellement non porteur.

Noël (AL Paris Nord-Est)

[1Institut national du sport et de l’éducation physique

[2Le CIDJ est le coordinateur des points informations jeunesse

[3Réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté

[4Centres d’information et d’orientation

[5Groupements d’Etablissements de l’EN pour, et association nationale pour la formation professionnelle des adultes.

[6Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances.

 
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