Motion de Coordination fédérale : Initier une stratégie écologiste pour l’UCL

Nous publions une version raccourcie de la motion adoptée à notre Coordination fédérale de février. Ce texte invite à réfléchir à la stratégie de notre organisation, en proposant une orientation révolutionnaire et libertaire, ancrée dans la lutte des classes et les contre-pouvoirs, se déclinant sur tous les champs de la lutte écologiste.
Les limites planétaires seront bientôt toutes atteintes, le réchauffement climatique s’accélère, les effets de la destruction de notre environnement sont devenus trop nombreux pour être listés, et ce sont bien le mode de production capitaliste et le productivisme qui en sont la cause. Les enjeux actuels de l’écologie ne font que rendre plus pressante l’urgence avec laquelle nous devons mettre fin à ce mode de production. « Faire la révolution » n’est plus simplement la marotte d’organisations politiques communistes ou anarchistes, mais c’est un impératif qui s’impose à qui veut bien prendre à bras-le-corps le désastre écologique en cours.
De même que sur les questions sociales, nous dénonçons l’incapacité du capitalisme à résoudre les crises qu’il engendre lui-même. Elles doivent conduire notre classe sociale à ne plus accepter la main-mise de la classe bourgeoise sur la production, ne plus accepter sa légitimité et son pouvoir. Toute lutte doit permettre d’étendre la prise de conscience sur l’urgence écologique et sur l’urgence d’en finir avec le capitalisme.
Dépasser les contradictions de notre classe
En tous cas, rien de fondamental ne pourra se faire sans l’intervention des travailleurs et des travailleuses, depuis leur lieu de travail, là où elles et ils sont. La définition des travailleurs et travailleuses comme sujets révolutionnaires écologistes potentiels par opposition au capital pris dans ses contradictions ne doit pas pour autant nous aveugler sur les contradictions de notre propre camp. Le mouvement ouvrier a pu avoir historiquement tendance à suivre la logique productiviste du capital à travers un compromis où les gains de productivité assurait des gains de salaire. Aujourd’hui encore, la question écologique ne fait pas l’unanimité au sein du syndicalisme de lutte. Il peut être compliqué d’articuler la solidarité entre travailleurs et travailleuses autour de revendications immédiates (salaires, emplois...) avec un projet d’émancipation anti-productiviste. Le dépassement de cette contradiction est nécessaire, elle doit se faire par la base, la pratique réelle et les alliances avec les personnes menacés par les effets négatifs de la production hors des lieux de travail.
Les mouvements écologistes concentrent majoritairement leurs efforts sur les luttes locales. Cette échelle d’action est particulièrement importante puisqu’elle permet d’arracher des victoires concrètes face au néolibéralisme. Les luttes locales permettent également de poser au cœur du débat public des questions d’aménagement du territoire, de remettre en question les modèles agricoles et, de manière plus générale, d’œuvrer pour une prise de conscience collective des problèmes écologiques et de leurs solutions.
Créer des alliances au sein des luttes locales
L’UCL a une carte majeure à jouer dans ces luttes locales. De par son implantation dans les syndicats, elle a une position privilégiée pour apporter ce qui manque souvent cruellement à ces luttes locales : un dialogue avec les travailleurs et travailleuses du secteur concerné via leurs syndicats.
Notre lutte doit aussi être internationaliste et anticolonialiste : nous refusons la délocalisation des pollutions. On ne s’oppose pas à une pollution parce qu’elle est chez nous mais pour le monde entier. Nos positions internationalistes nous obligent à penser de manière globale à chaque fois que nous agissons localement.
La possibilité de la révolution liera question sociale et question écologiste, et ne pourra se faire qu’en remettant en question ce qu’on produit et la manière dont on le produit. Cette révolution ne peut se faire qu’avec l’auto-organisation des travailleurs et travailleuses, dans des cadres démocratiques directs et de classe. C’est en faisant dialoguer un travail de fond sur les modes de production et les luttes écologistes spécifiques pour le vivant et les territoires que nous construirons une lutte révolutionnaire et écologiste à la hauteur des enjeux.
Développer une pratique militante de l’écologie sociale
Nous voulons construire en priorité des mouvements écologistes larges, y porter les idées anticapitalistes et autogestionnaires, notamment en participant à développer des coalitions pour parvenir à décrocher des victoires. Il nous faut lutter contre les dérives ou récupérations réactionnaires ou autoritaires que l’on peut observer dans certains courants écologistes. Nous défendons un écologisme de classe, qui se construit à la base, et nous défendons le fait que la crise écologique ne justifie en rien la continuation d’oppressions ou la défense d’un autoritarisme. Nous y combattons les freins à la prise de responsabilités des femmes et minorités de genre et y luttons contre les violences sexistes et sexuelles.
La question de la production doit être centrale aux luttes écologistes, nous devons poser dans le débat l’expropriation des capitalistes et la socialisation des moyens de production comme réponse à la catastrophe écologique. Au travers des débats qui animent certains secteurs, nous observons que parmi les dernières générations, l’urgence écologique remet sur la table le sens du travail, ce que l’on produit et la façon dont on le produit. Il reste à donner des perspectives à ce mouvement de fond, tout en restant alertes sur les bastions de l’idéologie productiviste encore bien en place dans certains secteurs.
Sur le plan de notre activité militante au sein du syndicalisme de lutte, nous proposons ces quelques pistes pour une activité militante et syndicale coordonnée :
• Lier les enjeux du travail à ceux de l’environnement, re-politiser ces questions, sur le volet industriel, le circuit de la production et de la marchandisation, comme sur le volet énergétique ;
• Remettre en cause l’utilité de la production et les conséquences écologiques du travail et de la production sur l’ensemble de la chaîne de valeur, le chantage à l’emploi, les « solutions techniques », les « emplois verts » et le « capitalisme vert » ;
• Remettre en cause la notion de transition même « juste », pour celle de rupture révolutionnaire ;
• Dénoncer à chaque occasion l’incapacité de l’État, des gouvernements et des capitalistes à instaurer une quelconque planification écologique, évidemment en rupture avec la sacro-sainte loi du profit ;
• Inscrire les enjeux environnementaux dans les priorités syndicales ;
• Impulser des alliances avec les autres acteurs de l’écologie politique militant déjà sur ces questions, favoriser les liens avec le monde du travail, exercer un rapport de force dans et en dehors de l’entreprise ;
• L’échelon local plus ou moins large est pertinent pour traiter des rapports qu’entretiennent la production, le travail, et l’environnement. Ouvrir aussi sur le cadre de vie, en lien éventuel avec des associations de riverains, dans une perspective de bien collectif ;
• Enfin, poser dans le débat la reconversion ou le démantèlement des entreprises les plus polluantes ou inutiles.
Union communiste libertaire