Plein feux

Contre le génocide en Palestine L’espoir venu des universités




Alors qu’Israël commet depuis sept mois un génocide à Gaza, dont les images insoutenables nous parviennent chaque jour, la mobilisation pour le faire cesser a été relancée depuis les universités. Celle-ci a donné lieu à une répression ahurissante qui donne la mesure du niveau de fascisation atteint dans ce pays. Mais nous ne baisserons pas les bras  ! Les facs nous montrent la voie  : résister au génocide, et lutter contre la complicité de notre impérialisme.

Dans de nombreux pays, la mobilisation contre le génocide commis par l’État d’Israël a été revivifiée ce mois de mai à partir des mobilisations universitaires. Parti des États-Unis, notamment au sein de l’université de Columbia, le mouvement s’est internationalisé. De McGill à Montréal à l’Università Statale de Milan, en passant par la Sorbonne ou Sciences Po à Paris, la solidarité n’a pas de frontières  !

En France, le mouvement de solidarité avec la Palestine tendait à s’essouffler avant l’essor des mobilisations universitaires. Essentiellement articulé autour de manifestations hebdomadaires le samedi le mouvement ne parvenait pas à décoller, même s’il débouchait certes parfois sur des actions très intéressantes notamment dans le cadre du mouvement Boycott, désinvestissements et sanctions (BDS) qui a connu un nouvel essor, ou dans certains collectifs pro-Palestine qui se réveillent ou voient le jour. Dans de nombreuses villes, le niveau de mobilisation s’est considérablement réduit, même si la détermination reste intacte. Là-bas, les bombardements continuent pourtant, et Israël organise la famine en bloquant, avec l’aide de colons suprémacistes fanatisées, les convois de livraison de nourriture dans un territoire où toutes les infrastructures civiles ont été systématiquement bombardées.

Un renouveau de la contestation

Mais heureusement, le renouveau du mouvement est venu des universités. Parti des États-Unis, un large mouvement d’occupation des facs, souvent accompagné de campements au sein du lieu d’étude, s’est mis en place. L’ambiance est déterminée  : les étudiantes remettent en cause la complicité de leurs États, mais aussi de leurs lieux d’étude, avec les génocidaires. Ce mouvement s’inscrit dans le cadre des revendications du mouvement BDS. Rappelons les principes du BDS  : boycott des institutions de l’État d’Israël et des entreprises complices de sa politique de colonisation, d’apartheid et de génocide  ; désinvestissement pour rendre cette politique le plus coûteuse possible à Israël  ; et pressions sur notre État pour obtenir des sanctions internationales à l’encontre de l’État sioniste  [1]. Le mouvement dans les facs s’inscrit dans la continuité du volet universitaire du BDS, qui réclame l’arrêt des partenariats avec les entreprises épinglées pour leur complicité avec Israël et avec les universités israéliennes, directement complices de la colonisation.

Plusieurs universités suisses ont été occupées pacifiquement par des étudiantes qui revendiquent la rupture de tous liens académiques avec les universités israéliennes

On peut citer comme exemple l’université Hébraïque de Jérusalem, qui a un campus en Cisjordanie occupée et a récemment licencié une professeure Palestinienne pour ses positions antisionistes, ou la participation de ces universités à l’effort de guerre, au moyen de multiples partenariats avec l’entreprise Elbit Systems ou de programmes spéciaux pour les soldats réservistes, co-organisés avec l’armée.

Complicité de génocide et répressions

Ce mouvement est parti du cœur des états impérialistes, complices du génocide en cours. Aux États-Unis, en France, en Italie, en Allemagne, l’enjeu n’est pas seulement moral  : c’est une question politique. En soutenant la libération de la Palestine, c’est notre impérialisme que nous combattons. En France, nous luttons contre notre État qui vend des armes aux génocidaires, leur assure un soutien financier, diplomatique et idéologique.
L’État ne s’y est d’ailleurs pas trompé, puisqu’il a envoyé sa police humilier et frapper, les étudiantes ! Les mêmes scènes se sont répétées partout en France  : occupation de fac, débloquage violent par les flics, insultes et contrôles humiliants à la clé. Les flics étaient amenées dans les facs pour y déloger celles et ceux qui exprimaient leur solidarité, sous les consignes de la ministre de l’enseignement supérieur Sylvie Retailleau elle-même.

À Sciences Po Lyon par exemple, les étudiantes ont été plaquées contre le mur, sous prétexte de fouille, des témoignages font état d’humiliations subies par nos camarades. À la Sorbonne, ce sont huit étudiantes qui ont été placées en garde à vue pour avoir tenté l’occupation d’une salle contre le génocide en cours  !

Accusation d’antisémitisme  : ne pas céder au chantage

Un des arguments majeurs contre la lutte pour la liberté en Palestine est, nous le savons, l’accusation d’antisémitisme. Comme si sous le prétexte que l’État d’Israël se prétend l’État des Juifs et Juives, il fallait se taire lorsqu’il commet des massacres  ! Derrière ces accusations, c’est en réalité une petite musique raciste et essentialisante qui voit le jour, qui veut que les Palestiniennes et leurs soutiens soient forcément des antisémites, et que les Juifs et Juives soient forcément des soutiens d’Israël  [2]. Si nous condamnons et combattons les expressions d’antisémitisme, d’où qu’elles viennent, tout cela est surtout une bonne façon de détourner le débat du génocide, pour faire peser le soupçon sur ceux qui le dénoncent, et non sur ceux qui le commettent ou le soutiennent.

Pour autant que nous avons pu le constater, ces mobilisations sont d’une très bonne tenue jusqu’à maintenant, et on ne peut que saluer les efforts faits pour lutter contre toute forme d’expression raciste au sein de nos mouvements sociaux. Alors, oui, restons vigilantes aux éventuels propos antisémites, et continuons de nous former et d’apprendre sur le sujet. Mais ne cédons pas aux chantages  : nous continuerons de défendre la libération de la Palestine et de lutter contre le sionisme.

Sur les réseaux sociaux, des gazaouies se sont filmées, dans les tentes où ils et elles vivent désormais après que les bombes ont rasé leurs maisons, arborant des messages de remerciements pour les étudiantes qui luttent. Et en France, c’est sur ces mêmes étudiantes que l’État envoie les flics  ! Les «  valeurs occidentales  », le «  pays des droits de l’homme  »… toutes ces formules creuses révèlent leur hypocrisie dès qu’on parle de la domination coloniale. On nous répondra qu’il est illégal d’occuper son université. Peut-être. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il est infiniment plus immoral de soutenir un génocide.

Daniel (UCL Lyon)

[1Nous avons récapitulé les enjeux de la campagne BDS et l’importance de s’y investir dans le webdito «   Boycott, Désinvestissements et Sanctions pour stopper l’apartheid israélien   » sur le site de l’Union communiste libertaire, Unioncommunistelibertaire.org

[2Sur les groupes juifs antisionistes, voir notamment «   Tsedek  : une voix juive pour la justice   », Alternative libertaire, n°347, mars 2024

 
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