Édito

Hypocrisie




De nouveau un adolescent se suicide, victime de harcèlement scolaire. Côté face, le ministre réagit, dénonce les faits, met en scène une réponse « martiale » avec l’arrestation en plein cours d’un élève harceleur et promet un « plan » composé de mesures inapplicables. Côté pile l’administration centrale, son fonctionnement vertical et sa culture du cloisonnement, menace les parents inquiets qui se plaignent. En réalité rien ne bougera car le harcèlement scolaire est au fondement de l’ordre social capitaliste.

En effet ces pratiques ne sont ni isolées ni aléatoires. Elles touchent de nombreux jeunes scolarisés mais portent plus spécifiquement sur des logiques de stigmatisation liées à des caractéristiques sexuelles, sociales ou physiques. Et ce n’est pas un hasard si les élèves sont plus exposés au collège. Car si les inégalités sociales sont évidemment présentes en amont, c’est au collège que l’ordre social se matérialise institutionnellement. Une violence douce, légitimée par l’ordre scolaire, ses notes, ses options distinctives et ses filières de tri.

Au fond les élèves ne font qu’appliquer à la lettre cette logique immanente qui ne dit pas son nom. Ils trient et tentent de se distinguer en écrasant celles et ceux perçus comme « faibles » dans une période où se matérialisent les hiérarchies sociales et scolaires. Que ce soit au collège ou dans l’enseignement supérieur, où les pratiques de bizutage poursuivent la même logique, le harcèlement est au principe de la hiérarchisation sociale. Prétendre lutter contre le harcèlement sans s’attaquer à cet ordre social n’est qu’hypocrisie.

UCL, 27 septembre 2023

 
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