Antipatriarcat

Comprendre les transitions de genre : Changer de sexe à l’état civil




Deuxième article de la série sur les luttes trans : après les traitements hormonaux le mois dernier, changeons de registre et parlons d’état civil. Avoir des pièces d’identité au mauvais prénom ou au mauvais sexe est au mieux pénible, au pire dangereux.

En France, jusqu’en 2016, il était très difficile de changer de sexe à l’état civil. Il fallait entre autres prouver être atteint d’un « syndrôme transexuel » et avoir subi un traitement stérilisant. Le tribunal demandait des expertises invasives et coûteuses [1]. La loi de 2016 a considérablement amélioré la situation. Les changements de prénom peuvent se faire en mairie, et le changement de mention de sexe est simplifié : tous deux ne requièrent que de prouver une transition sociale [2]. Cependant, ce dernier nécessite encore une requête au tribunal.

L’application de la loi est inégale. Certaines mairies rejettent tout changement de prénom pour transidentité : cela atterrit chez le procureur, souvent plus conservateur que les officiers d’état civil. Si ce réflexe peut s’expliquer par un manque de compétence, il s’agit aussi souvent de transphobie. Les tribunaux ne sont pas en reste : certains réclament encore des preuves médicales ou jugent sur l’apparence.
Réunir des preuves d’une transition sociale peut s’avérer compliqué. Comment fournir des factures à son nouveau prénom quand nombre de services (téléphone, Internet...) requièrent une pièce d’identité  ? Comment recueillir les indispensables témoignages de proches quand on a une famille hostile, ou quand on est isolé socialement  ?

Des traces dangereuses

Lorsque la demande est acceptée commence un calvaire pour faire changer ses informations partout : banque, administrations, diplômes... Et des traces subsistent : l’acte de naissance intégral mentionne les changements, et les actes des enfants et époux ne sont modifiés qu’avec leur accord. Avec les archives des tribunaux, on a là une bombe à retardement attendant de tomber entre de mauvaises mains. Le procureur général du Texas s’est ainsi constitué une liste de toutes les personnes trans sur son territoire…

À l’international, nombre de pays empêchent tout changement de sexe ou requièrent encore une stérilisation. La vague transphobe actuelle freine les avancées (comme en Écosse [3]) ou menace de graves retours en arrière (comme aux États-Unis [4]).
En vérité la mention de sexe à l’état civil n’a aucun intérêt et devrait être supprimée. C’est une revendication de nombre d’organisations, liée aussi à l’accès à la PMA pour toutes et tous et qui prendrait en compte les personnes non-binaires.

Chloé (UCL Grenoble)

[1Avis sur l’identité de genre et sur le changement de la mention de sexe à l’état civil, CNCDH, 31 juillet 2013

[2Loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, 18 novembre 2016.

[3« UK Government to block Scottish Parliament’s Gender Recognition Reform over ‘significant impact’ on ‘GB-wide equalities’ », The Scotsman, 16 janvier 2023.

[4Voir le fichier « Anti-LGBTQ Legislative Tracking » à l’adresse https://t.co/ejYDsffNQm

 
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