Culture

Lire : Roumier « Autogestion et révolution. Charles Piaget, interventions 1974 »




Bientôt cinquante ans qu’on en cause et qu’on écrit à propos de LIP ! Encore un livre… Oui, celui de notre camarade Théo Roumier. Cette fois, même si cela est esquissé dans l’introduction, l’enjeu central n’est pas de raconter la grève, ses origines, ses contradictions, son caractère autogestionnaire, les désobéissances à l’ordre établi et parfois aussi aux confédérations syndicales et partis politiques … Il rappelle et analyse le contexte.

«  Contrôler aujourd’hui pour décider demain  », tel était le titre du manifeste adopté par le Parti socialiste unifié (PSU) lors de son congrès de décembre 1972  ; voilà qui plante le décor. Ce sera aussi le cadre d’intenses débats au sein du mouvement ouvrier de l’époque  : la CFDT est alors pleinement autogestionnaire. Mais le PSU ne parviendra pas à l’attirer dans le Comité de liaison pour l’autogestion socialiste (CLAS), auquel s’intéresseront fortement les marxistes révolutionnaires de l’Alliance marxiste révolutionnaire (AMR) ou des Centres d’initiative communiste (CIC) , mais aussi des membres de l’Organisation révolutionnaire anarchiste (ORA), du CERES au sein du PS, … et des militantes et militants CFDT.

Une des raisons de l’échec du CLAS est que, dans le même temps, des courants du Parti socialiste et la direction confédérale CFDT organisaient l’opération dites des Assises du socialisme, avec en point de mire… les élections législatives de mars 1973 et présidentielles d’avril 1974. Charles Piaget, la majorité du PSU et d’autres forces politiques refuseront de se lier aux objectifs électoraux du Parti socialiste. L’autogestion mérite et nécessite mieux !

Le travail ici transmis a été réalisé pour l’Institut Tribune socialiste ; il tourne donc autour de l’action du Parti socialiste unifié (PSSU dans cette période) : extraits d’entretiens et discours de Charles Piaget à l’appui. Piaget, le PSU, deux éléments incontournables quand on parle de LIP ; les deux sont liés, mais aucun des deux ne saurait se limiter à l’autre. Qu’on me permette ici de proposer un complément à la production de Théo Roumier : le dernier livre de Charles Piaget, On fabrique, on vend, on se paie. Lip, 1973 (Syllepse, 2021). Dans un format proche du livre ici chroniqué, c’est un excellent manuel du syndicaliste révolutionnaire, même si Charles Piaget ne se réfère pas à ce terme.

On trouvera dans la bibliographie matière à réfléchir sur tous ces sujets et bien d’autres ; en commençant, si possible, par les écrits et paroles des premiers et premières concerné∙es, les grévistes de ces années-là.

Théo Roumier prolonge ce moment d’histoire sociale, par quelques réflexions qui ne sont pas sans lien avec le sujet d’un récent numéro de la revue Les Utopiques  [1]. Sans dévoiler l’ensemble, car il faut acheter et lire le livre de Théo, disons que trois éléments sont fort justement mis en avant  : la différence entre stratégie réformiste et stratégie révolutionnaire, entre socialisme «  par en haut  » et dynamique à la base  ; l’indispensable action autonome de la classe ouvrière  ; la priorité aux pratiques militantes, aux actions directes collectives, et non aux discours, aux joutes doctrinaires. Très actuel tout cela…

Christian (UCL Banlieue sud-est)

  • Théo Roumier, Autogestion et révolution. Charles Piaget, interventions 1974, Les Cahiers de l’ITS, éditions du Croquant, 2022, 120 pages, 10 euros.

[1«  Pouvoirs, politique, mouvement social  », Les Utopiques n°19, Syllepse, printemps 2022.

 
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