Solidaires en congrès : Préparer les luttes de demain




Du 12 au 16 juin dernier, à Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor), s’est tenu le 7e congrès national de l’union syndicale Solidaires. Plus de 400 délégué.es avaient fait le déplacement, représentant 43 fédérations et syndicats nationaux, et 60 structures interprofessionnelles départementales.

Le congrès de Solidaires s’est tenu du 12 au 16 juin à Saint-Brieuc dans les Côtes-d’Armor. Il a témoigné du développement de l’union syndicale  : avec plus de structures, plus de syndicats depuis le dernier congrès, Solidaires voit son implantation progresser. Tout en restant un «  petit  » syndicat de plus de 100.000 adhérentes et adhérents.

La soirée d’ouverture du Congrès a été l’occasion de revenir sur la lutte des salariés de Triskalia [1], empoisonnés aux pesticides et activement soutenue par l’union départementale Solidaires des Côtes-d’Armor : un des exemples de la volonté de construire des outils syndicaux utiles, radicaux et pragmatiques.

Quels enjeux pour le syndicalisme Solidaires  ?

Le lendemain, le rapport d’activité présenté par le secrétariat national sortant a permis un premier échange où le bilan de la lutte contre la loi travail et son monde du printemps 2016 a tenu la première place. Les différentes interventions ont confirmé que les structures de Solidaires se sont bien souvent trouvées à la croisée des formes de mobilisation entre Nuits debout, blocages, manifestations et grèves.

Pour autant certains ont rappelé la nécessité à ne pas s’engager dans des voies de substitution au « cœur de métier » du syndicalisme à savoir construire les résistances et l’action collective au travail. Pour bloquer l’économie, rien de mieux qu’une grève longue, ancrée et la plus généralisée possible. Et c’est là que le bât blesse puisqu’il a aussi été constaté que même dans les implantations les plus solides de Solidaires (à la Poste, dans le rail, les finances publiques…) ou celles de l’industrie ou de la chimie par exemple, la grève n’a soit pas pris, soit très difficilement. Autant de questions qui se sont retrouvées dans le débat d’actualité du jeudi soir.

Trois résolutions étaient soumises aux congressistes. La résolution sur l’international cristallisait également un certain nombre de débats généraux (racisme, anticolonialisme, autogestion). Une seconde résolution était consacrée aux évolutions du travail et aux objectifs que Solidaires devait adopter en conséquence. Enfin, la dernière résolution était consacrée à l’outil syndical qu’est aujourd’hui Solidaires et témoignant d’une organisation toujours en construction sur bien des aspects.

Le fonctionnement de Solidaires veut que l’essentiel des points qui font débat puisse trouver au préalable un consensus respectant les différentes sensibilités de l’union. Les dernières aspérités arrivent jusqu’au congrès sous formes d’amendements qui sont étudiés en commission pour voir si un consensus peut encore être trouvé. N’arrivent aux votes en plénière que les amendements qui, sans consensus, sont maintenus par les structures les présentant.

À ce titre, un des débats qui était resté en jeu pour le congrès était celui de la référence à l’autogestion et à l’appropriation sociale et collective des moyens de production : loin d’être hors-sol, il s’agit bien d’une orientation fondamentale pour un syndicalisme qui se réclame de la transformation sociale. Une structure historique, Solidaires Finances publiques, est toujours en discussion sur ces enjeux et pouvait apparaître frileuse sur la question : pour autant il a été possible d’avancer pour que la perspective autogestionnaire soit bel et bien présente dans les textes votés.

Dans l’ensemble, les textes du congrès de Solidaires donnent des éléments pour agir, revendiquant par exemple de prendre en charge syndicalement les travailleurs et travailleuses exclu.es du salariat du fait de leur statut d’auto-entrepreneur. Il reste maintenant à décliner en campagnes de syndicalisation et revendicatives les axes dégagés.

Notons aussi qu’à côté des débats de fond, des évolutions statutaires restent souhaitables dans les années à venir : sans entrer plus dans les détails ici, nous aurions pu nous épargner les obstacles pénibles posés par deux structures seulement au sujet du renouvellement du secrétariat national.

Face aux ordonnances Macron

Bien sûr l’actualité sociale n’a pas été absente de ce congrès. Le débat du jeudi soir qui y était consacré a permis de donner à voir les différents points de vue : plusieurs structures ont rappelé la nécessité de construire les résistances (et même de continuer à construire nos syndicats) dans les boîtes et les services pour espérer voir aboutir un mouvement de masse contre les ordonnances Macron.

Des structures défendaient un engagement plus affirmé de Solidaires au sein du collectif « Front social », proposant une motion d’actualité en ce sens (présentée par cinq fédérations et trois Solidaires départementaux). Si cette motion fixait clairement comme objectif de l’union de construire et développer « Front social », on notera qu’elle était plus « tempérée », notamment sur le rapport aux « directions » syndicales (bien que ce vocable soit hors sujet concernant Solidaires), que ce qu’avaient habitué certaines interventions des animateurs nationaux de ce collectif. Interventions qui, particulièrement le 8 mai, laissaient à penser que « Front social » envisageait de se substituer aux intersyndicales nationales et départementales.

Sur ce point, dans Solidaires en tout cas, il y a eu une inflexion du discours. Ce qui a entre autres permis que Solidaires appelle aux manifestations du 19 juin. De même, la discussion en commission autour de la motion d’actualité générale (faisant office de «  fil à plomb  » pour les mois à venir) a permis d’affiner les propositions stratégiques de l’union, rappelant notamment qu’on « ne peut pas faire l’économie aujourd’hui d’un débat, entre organisations syndicales, avec les salarié.es, sur le blocage de l’économie et de la production, donc sur la grève générale. Sans pour autant tomber dans l’incantation, en en mesurant toutes les difficultés, mais sans en négliger les enjeux et la nécessité ». [2]

Pour cela, Solidaires compte s’appuyer sur sa proposition d’une première journée de grève interprofessionnelle et intersyndicale en septembre (mais aussi en appelant à manifester le 30 août à Jouy-en-Josas contre l’université d’été du Medef). Malgré ça, deux fédérations (Commerce et Industrie) et une structure départementale (92) ont tenu à maintenir un vote sur la motion « Front social » initiale.

Pour beaucoup de délégué.es, cette tentative a été perçue comme un mépris du travail de consensus et une volonté de « découper » le congrès qui n’était pas des plus heureuses  : c’est assez logiquement qu’elle a du coup été largement rejeté. Toujours est-il qu’il nous reste du travail d’organisation en perspective pour que les mots de congrès se transforment en action.

Des communistes libertaires de Solidaires

[1Voir le site « La Petite Boîte à Outils » de solidaires, dédié aux conditions de travail, les articles consacrés à ce combat

 
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