Syndicalisme, Répression

Education : les « quatre de Melle », frappé.es pour l’exemple




Des gendarmes au lycée, des élèves enfermés, un proviseur muté, une institution en plein dérapage… mais ceux qui sont menacés de sanction, ce sont quatre profs qui ont contesté la réforme du bac ! Mutée d’office, exclue quinze jours, rétrogradé, blâmée... un scandale !

Le 12 octobre, un millier de personnes venues de tout l’ouest du pays ont manifesté devant le rectorat de l’académie de Poitiers en soutien à quatre profs du lycée Desfontaines de Melle (Deux-Sèvres), convoquées en conseil de discipline du 12 au 16 octobre pour avoir contesté les « E3C », les nouvelles épreuves du bac.

Rappelons le contexte. Le baccalauréat 2019 avait déjà été fortement perturbé par une mobilisation historique contre la loi Blanquer, ce qui avait poussé le ministère à des mesures illégales pour endiguer la contestation. La colère a de nouveau éclaté en janvier-février 2020 contre les épreuves communes de contrôle continu (dires « E3C ») issues de cette réforme. À nouveau, le ministère a méprisé les personnels. Au lycée Desfontaines, pour assurer la tenue des épreuves, on a vu débarquer pas moins d’une quarantaine de gendarmes ! Le lycée a été bloqué... mais par la direction, qui a enfermé les élèves dans les salles, sanglé une porte coupe-feu et désactivé les alarmes incendie ! Angoissés, plusieurs élèves ont fait des malaises, et une famille a porté plainte pour mise en danger d’autrui. Le proviseur a depuis été muté, indice d’un sévère dysfonctionnement.

Et pourtant, en mars, la machine répressive a ciblé trois profs, syndiquées SUD. Il et elles ont été suspendues à titre conservatoire, avec interdiction de se rendre sur le lieu de travail ou d’entrer en contact avec les élèves ou leurs collègues. Une enquête administrative a été lancée pour monter un dossier à charge. Six mois plus tard, il est toujours bien vide.

« Incitation à l’émeute », « atteinte à la dignité »...

Aux trois profs suspendues en juin s’est ajoutée, en septembre, une quatrième collègue, convoquée elle aussi en conseil de discipline. Tenus en octobre, ces conseils sont paritaires et uniquement consultatifs, la rectrice de l’académie ayant le dernier mot. Les faits reprochés sont aussi vagues qu’absurdes : « incitation à l’émeute », « atteinte à la dignité » ou encore « manquement aux obligations professionnelles ». Il et elles n’ont fait qu’exercer leur droit de grève et ­d’expression syndicale.

Le 12 octobre a eu lieu, à Poitiers, le premier des quatre conseils de discipline. À l’appel d’une large intersyndicale initiée par la fédération SUD-Éducation, plus de mille personnes sont venues de toute l’académie et au-delà pour affirmer haut et fort leur solidarité, sans compter les rassemblements dans d’autres villes. Des rendez-vous de protestation analogues ont eu lieu à chacun des trois autres conseils de discipline les 13, 14 et 16 octobre.

Le verdict est tombé le 5 novembre : mutation d’office pour Sylvie Contini ; exclue de ses fonctions (donc sans salaire) durant quinze jours pour Cécile Proust ; rétrogradation pour Aladin Lévêque ; blâme pour Sandrine Martin.

Cette répression indigne ne fera pas taire la contestation d’une politique capitaliste qui détruit l’école publique. Et à l’heure où la répression se systéma­tise, la solidarité est vitale.

Benjamin et François (UCL Poitiers)

 
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